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La moitié des abandons de poste sont réalisés avec l’accord de l’employeur

mercredi 2 août 2023

L’Unédic en novembre 2022 a réalisé une enquête sur un échantillon de 6 999 allocataires indemnisés à la suite d’un licenciement pour motif personnel afin de savoir combien avaient effectué un abandon de poste, quelles en étaient les motivations, et quels auraient été leurs parcours si cet abandon de poste ne leur avait pas permis d’aboutir à une prise en charge par l’assurance chômage.

En 2022, il y a eu 160 000 ouvertures de droit après licenciement pour faute grave dont 76 000 pour abandons de poste, soit 48 %. Les abandons de poste sont presque tous liés à des ruptures de CDI et sont plus fréquents en première partie de carrière professionnelle d’après l’enquête Unédic auprès des demandeurs d’emploi. La DARES, à la suite d’une enquête auprès des employeurs, estime à 50 000 abandons de poste au 1er semestre 2022 suivis d’une ouverture de droit à l’assurance chômage, soit un effectif annuel un peu plus important que celui estimé par l’Unédic, de l’ordre de 100 000 personnes hors saisonnalité.

D’après l’Unédic, près de 80 % des personnes abandonnant leur poste ont moins de 40 ans : (43 % de moins de 30 ans, 35 % de 30 à 39 ans). Ils diffèrent des autres personnes indemnisées par l’assurance chômage par leur âge et par leur type de contrat.

  • Autant d’hommes (51 %) que de femmes (49 %).
  • Un peu moins de la moitié est diplômé d’un Bac ou plus (48 %).
  • Presque tous ont fait un abandon de poste dans le cadre d’un CDI (97 % en CDI, 3 % après un CDD ou une mission d’intérim), alors que les ruptures de CDI sont beaucoup moins présentes parmi les allocataires dans leur ensemble (39 %).
  • Du fait de leurs parcours d’emploi et de leur profil sociodémographique, les allocations journalières brutes (AJ) des personnes ayant abandonné leur poste se situent dans la moyenne (37 €), contrairement aux personnes indemnisées après une rupture conventionnelle, dont les AJ sont élevées (47 €). Leurs droits à l’assurance chômage sont en majorité de deux ans (74 %) en lien avec le fait que les abandons de poste sont à peu près de 97 % issus de ruptures de CDI.

Les motivations des personnes abandonnant leur poste sont diverses. Elles peuvent être liées aux conditions de travail, au souhait du salarié de se reconvertir ou encore à des problèmes de mal-être ou de harcèlement. D’après les réponses des allocataires interrogés, les abandons de poste sont la plupart du temps précédés d’un refus par l’employeur de signer une rupture conventionnelle :

  • Les réponses les plus fréquentes concernent les conditions de travail (absence d’évolution, relation hiérarchique, charge de travail, horaires) ;
  • Ensuite, sont souvent invoqués des objectifs personnels ou professionnels et des souhaits de reconversion ;
  • D’autres enfin, évoquent des problèmes de santé ou des situations de mal-être ou de harcèlement ;
  • Un tiers des personnes interrogées déclarent ne pas avoir su qu’elles toucheraient des allocations chômage avant d’effectuer un abandon de poste.

La moitié des abandons de poste sont faits en accord avec l’employeur :

  • Quatre personnes sur cinq disent qu’elles avaient demandé une rupture conventionnelle préalablement à leur abandon de poste et qu’elles se l’étaient vu refuser.
  • 72 % témoignent de bonnes relations avec leur employeur (29 % de très bonnes relations) avant leur abandon de poste.
  • Selon les allocataires interrogés dans l’enquête, les abandons de poste ont été faits pour moitié en accord avec leur employeur (27 % déclarent qu’ils se sont mis d’accord avec leur employeur avant l’abandon, 23 % que c’est l’employeur qui a suggéré l’abandon).

La part des abandons de poste parmi les licenciés pour faute grave est cependant plus élevée que la moyenne (48 %) dans le commerce, transport et entreposage (53 %) et dans l’hébergement et restauration (52 %). Elle est en dessous de la moyenne dans l’industrie (45 %) et dans la construction (34 %). Ces résultats sont cohérents avec ceux publiés par la DARES.

Les abandons de poste progressent peu depuis 2010 alors que, dans un même temps, le volume de ruptures conventionnelles a fortement progressé passant de 250 000 à un peu moins de 400 000 par an :

  • Les licenciements pour faute lourde sont rares et ne représentent que 0,05 % d’ouvertures de droit.
  • L’indemnisation de personnes ayant été licenciées pour faute grave représente 3,0 Md€ de dépenses d’allocation en 2022 pour l’Unédic, un montant proche de celui observé avant la crise Covid en 2019.
  • Difficile de distinguer à partir des données administratives quelle part provient des abandons de postes ou d’autres motifs de licenciements tels que l’indiscipline, le harcèlement…

Qu’auraient fait les personnes si elles n’avaient pas été indemnisées par l’Assurance chômage ? Un peu moins de la moitié (43 %) des personnes interrogées déclarent qu’elles auraient démissionné ou qu’elles auraient quand même abandonné leur poste. 4 % seraient restés en poste. Ainsi 47 % ne donneraient pas lieu à indemnisation.

  • Près d’un tiers des personnes interrogés (32 %) auraient cherché d’autres solutions ; dont 16 % disent qu’elles auraient discuté avec leur employeur d’autres solutions de départ possibles et 16 % auraient adopté une attitude incitant leur employeur à les licencier ;
  • 3 % hésitent entre ces deux réponses
  • 21 % ne savent pas ce qu’elles auraient fait.

La loi « marché du travail » de décembre 2022 a modifié les droits au chômage pour les salariés qui abandonnent leur poste en instituant une présomption de démission en cas d’abandon de poste par le salarié. Cette nouvelle procédure est entrée en vigueur le 19 avril 2023 (décret n° 2023-275).

  • Jusqu’alors l’abandon de poste pouvait donner lieu à un licenciement pour faute grave qui ouvrait droit à indemnisation par l’Assurance chômage. Désormais la présomption de démission fera obstacle à une ouverture de droit à l’assurance chômage.
  • Selon les changements de comportements des employeurs et des employés à la suite de l’instauration de cette nouvelle procédure, les moindres dépenses engagées seraient à terme comprises entre 380 M€ et 670 M€ sur une année.

Désormais un salarié qui abandonne son poste à compter de la mise en demeure de son employeur dispose de 15 jours pour justifier son absence et reprendre son poste. Passé ce délai il est considéré comme démissionnaire et il n’ouvre pas de droit à l’assurance chômage. Cette nouvelle disposition, au-delà de son incohérence juridique, ne se base sur aucune étude ou chiffrage (la Cour de cassation estime que la démission ne peut se présumer).


Référence