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L’inculture économique des Français

dimanche 30 novembre 2008

L’opinion publique fait montre de sérieuses lacunes sur des mécanismes généraux élémentaires. L’importance de l’Europe pour les exportations françaises et les avantages de l’euro pour les entreprises sont méconnus.

Les Echos du 20 novembre 2008 publient, sous la signature de Jean-Claude Lewandowski, les conclusions d’un intéressant sondage de la Fnege (Fondation nationale pour l’enseignement de la gestion des entreprises) à partir d’un échantillon d’un millier de Français interrogé sur 27 questions fermées portant sur leur connaissance de l’entreprise et de son environnement.
Le diagnostic est sans appel :
les Français recueillent un 6 sur 20, seulement 7% des personnes interrogées atteignant la moyenne. Et la technicité éventuelle des propositions de réponses n’est pas seule en cause.

L’opinion publique fait montre de sérieuses lacunes sur des mécanismes généraux élémentaires. Quelques exemples : 32 % des membres de l’échantillon confondent allègrement le chiffre d’affaires avec les bénéfices ; 11% pensent que la TVA est partagée entre l’Etat et l’entreprise ; 26% estiment que le dividende est la plus-value de cession de l’action et 7% la valeur de l’action. L’importance de l’Europe pour les exportations françaises et les avantages de l’euro pour les entreprises sont méconnus.

Certes des différences existent évidemment selon le niveau de diplôme et la catégorie socioprofessionnelle, mais pas vraiment selon les générations. Pire, les bacheliers en économie se montrent à peine meilleurs que les autres. C’est dire l’efficacité du système de formation initiale en la matière.

Mais tout n’est pas noir. Car les Français possèdent aussi des notions assez fiables, dès lors que sujet les touche dans leur vie courante, ou sont traités couramment par les médias. Ainsi, ils connaissent le CAC 40, le taux de TVA (84 % de bonnes réponses) ; ils ne se méprennent pas sur l’activité d’Alcatel-Lucent ou d’AXA, dont ils sont les clients directs, alors qu’ils ignorent AREVA ; le comité d’entreprise est plutôt bien cerné, de même que les modalités de fusion de deux grandes entreprises.

Mais le principal problème que fait apparaître l’étude est ailleurs. « En réalité, on assiste à une dérive flagrante, souligne Jean-Pierre Boisivon, de la FNEGE. La plupart des réponses erronées convergent dans un même sens : celui d’une vision dévalorisée ou négative de l’entreprise. » C’est ainsi que les personnes interrogées ont tendance à minorer les coûts salariaux pour les entreprises, tout comme leurs charges sociales. Et au contraire à « gonfler » la part des emplois précaires : un Français sur trois estime entre 20 % et 30 % la proportion de CDD dans les contrats de travail (moins de 10 %, en réalité). De même, si l’on connaît assez bien le taux de TVA, celui de l’impôt sur les sociétés est à peu près ignoré. Quant au montant des dividendes perçus par les actionnaires, il est nettement surestimé.

La FNEGE regrette une vision qu’elle estime « caricaturale », « selon laquelle les salariés sont réduits à la portion congrue, tandis que les actionnaires se gobergent. ». Mais, là encore, si les médias et les gros titres de l’actualité sur les pratiques patronales ont leur part de responsabilité, constatons seulement que la perception commune traduit à sa façon un indéniable sentiment d’exploitation.

Trois réflexions :

Une : Il serait donc intéressant que la FNEGE ou une autre fondation se livre au même type d’exploration sur le champ du social, ne serait-ce que pour voir si l’on y constate des ignorances ou des distorsions analogues. En ces temps de crise financière, de récession économique et donc d’appréhensions sociales, de telles approches en affinant les diagnostics devraient éclairer les décideurs et leur éviter de grossières erreurs de pilotage.

Deux : Il y a quelques semaines, on a pu suivre le débat sur la nature de l’enseignement de l’économie au lycée. Faut-il faire un lien ? Et faut-il aussi se demander si les raccourcis de la presse sont totalement à l’écart de ce constat ?

Trois : il fût un temps où les syndicats développaient des formations économiques pour leurs militants. Et on lit dans la ligne budgétaire des crédits accordés aux organisations syndicales : « formation économique et sociale des cadres syndicaux. Sans commentaire.