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L’impact des mathématiques dans l’économie et l’emploi

mercredi 1er février 2023

La France est reconnue comme un grand pays de mathématiques, deuxième pour les médailles Fields (le « Nobel des mathématiques ») comme pour les publications dans les revues les plus sélectives, derrière les États-Unis. Mais voit-on à quel point les mathématiques, sciences de l’abstraction, sont en fait indispensables à l’économie et à l’emploi ? C’est ce que vient d’argumenter avec précision l’Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions (Insmi-Cnrs).

Les chiffres montrent un fort impact

  • Dans l’emploi

En effet, ils ont comptabilisé 3,3 millions d’emplois concernés par les mathématiques, soit 13 % des salariés, en augmentation de 14 % entre 2012 et 2019, soit +2 % par an quand l’emploi total augmentait de +0,7 % par an seulement.

Bien sûr, l’informatique est le premier secteur concerné car les maths y impactent 79 % des emplois. Mais c’est loin d’être le seul, comme le montre ce tableau, à comparer avec le taux tous secteurs des emplois concernés, à 13 %.

Part des emplois impactés, par secteur (en % des emplois du secteur)
Informatique 79
R&D 72
Production et distribution électricité et gaz 59
Télécommunications 59
Fabrication de produits informatiques, électroniques, optiques 57
Activités juridiques, comptables, de gestion, architecture, ingénierie, contrôle et analyses techniques 45
Industrie pharmaceutique 44
Finances et assurances 32
Tous secteurs 13

Parmi ces 3,3 millions d’emplois impactés, on trouve pour 40 % des ingénieurs informatiques, 28 % des techniciens, 23 % des cadres des services financiers, 6 % de personnel de direction et 4 % de cadres de la fonction publique (recherche, État, hôpitaux, professeurs du secondaire et du supérieur). En particulier, on compte 3 500 chercheurs et enseignants-chercheurs en mathématiques, mais ces derniers sont en nombre moindre (-8 %) qu’en 2010 en raison de la baisse des postes en mathématiques fondamentales.

35 % de ces emplois sont situés en Île-de-France, 12 % en Auvergne-Rhône-Alpes, 8 % en Occitanie. La croissance la plus forte entre 2012 et 2019 se rencontre dans les Pays-de-la-Loire (+3,1 % par an) et en Occitanie (+2,9 % par an).

  • Dans l’économie

L’Insmi a calculé que la contribution des mathématiques à l’économie représentait 381 milliards€ de valeur ajoutée en 2019, soit 18 % du total de l’année. En hausse de 2 points par rapport à 2012 (16 %), elle progresse plus vite que la valeur ajoutée en France. En cela elle est une contribution similaire à celle du Royaume-Uni et supérieure à beaucoup de pays européens.

L’importance de la recherche en mathématiques, en lien avec d’autres sciences, est prévue comme croissante pour l’économie, en raison de l’apparition de nouveaux besoins en innovation et aux défis environnementaux. On s’attend à de forts besoins en connaissances mathématiques, en particulier en ingénieurs informatiques, ingénieurs et cadres techniques d’industrie, personnels d’études et recherche…

Même si les mathématiques fondamentales sont un objet de recherche sans relation immédiate avec les entreprises, elles engendrent des retombées à long terme sur l’activité - comme le montre par exemple le « petit » théorème de Fermat [1] devenu indispensable dans la sécurité des échanges numériques (cryptographie), utilisé aussi dans l’économie, la démographie, l’étude des réseaux sociaux …plus de 3 siècles et demi après son énoncé par son découvreur. Quant à elles, les mathématiques appliquées sont très demandées par les entreprises pour les applications qu’elles permettent de créer pour leurs activités.

Enjeux et questions

Ainsi les entreprises recherchent des compétences avancées et intermédiaires en mathématiques mais un certain nombre déplore une diminution de compétences de base ou intermédiaires parmi les salariés et essaie de compenser par de la formation continue. Elles expriment un besoin de dialogue et de collaborations plus nourries entre entreprises et chercheurs et doctorants.

Or, alors que les mathématiques sont un domaine d’excellence de la recherche en France, on constate une baisse du niveau général des élèves en maths. Les différentes enquêtes le confirment, que ce soit les enquêtes Pisa [2] qui montre une baisse du niveau en maths des élèves de 15 ans de -4 % entre 2000 et 2018, les études Timss pour les élèves de CM1 et de 4ème où la France se montrent en-dessous du niveau moyen de l’UE et de l’Ocde, ou la Depp (direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance – ministère de l’Éducation nationale) qui démontre que le niveau de maths en CM2 est en baisse depuis 35 ans (1987), quelle que soit la catégorie socioprofessionnelle des parents, avec en plus un creusement des écarts entre les élèves en difficulté et les autres élèves. La fondation Jean Jaurès ajoute le constat d’une mésinformation des jeunes à la science et une attitude plus critique à son encontre [3]. La disparition des maths en fin de lycée dans la réforme Blanquer, annulée par le nouveau ministre, ne risquait pas d’arranger les problèmes !

Plus positif, le nombre d’étudiants en maths dans le supérieur augmente avec, en 2020, 915 000 étudiants en formation scientifique (32 % des étudiants du supérieur) dont 330 000 en mathématiques (formations d’ingénieurs, classes préparatoires, DUT, licence-master-doctorat). D’ailleurs leur insertion professionnelle est positive, mais beaucoup vers les secteurs public et académique. Les passerelles vers le secteur privé et les perspectives de carrière ont besoin d’être élargies.



Ainsi, les mathématiques sont et seront un atout fort pour la compétitivité et l’innovation, donc au final pour l’emploi. À l’ère du numérique les mathématiques sont encore plus essentielles.


Source


Notes :

[1Le « petit théorème de Fermat » (1640) : « Tout nombre premier mesure infailliblement une des puissances -1 de quelque progression que ce soit, et l’exposant de ladite puissance est sous-multiple du nombre premier donné -1 ».