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Les entreprises autour de 50 salariés semblent sous-déclarer leurs effectifs ?

samedi 30 avril 2022

Les seuils sociaux font souvent l’objet de critiques dans les milieux patronaux et à droite de l’échiquier politique. Ils nuiraient à la compétitivité des entreprises et limiteraient leur croissance pour éviter des coûts supplémentaires. De nombreuses entreprises déclarent des effectifs juste inférieurs à 50 salariés pour éviter ces contraintes. Mais si l’on y regarde de plus près, la surreprésentation des entreprises de 49 salariés dans les statistiques basées sur les déclarations des entreprises ne se retrouve pas quand on analyse les données issues des DADS (déclaration annuelle des données sociales) qui sont plus en rapport avec la réalité. C’est ce qu’il faut retenir de la note publiée en mars 2022 par l’IPP intitulée « Les entreprises sous-déclarent-elles leurs effectifs à 49 salariés pour contourner la loi ? ». Cela mérite quelques explications…

Y a-t-il un réel effet de seuil autour de 50 salariés ?

Les chercheurs de l’IPP ont d’abord repris les statistiques basées sur les déclarations fiscales des entreprises. Et c’est un fait, il y a une réelle césure entre la proportion d’entreprises déclarant 49 salariés et celles déclarant juste 50 ou un peu plus. On retrouve par ailleurs la même césure à partir des déclarations des entreprises aux greffes des tribunaux de commerce. Mais quand on regarde celles issues des DADS cette césure disparait. En réalité il n’existe pas de différences de nombre entre les entreprises de 49, 50, ou encore 51 salariés et plus.

Quelle peut être l’explication d’une telle différence ?

D’un côté, des statistiques basées sur du déclaratif qui, selon les auteurs de la note, pour ce qui est des déclarations fiscales n’entrainent pas de conséquences sur l’imposition des entreprises et de ce fait n’intéressent pas les contrôleurs fiscaux. Quant aux déclarations dans les tribunaux de commerce, malgré un arsenal juridique solide les sous-déclarations sont rarement sanctionnées d’après les auteurs. Enfin, ces données n’intéressent pas les inspections du travail ou l’URSSAF puisqu’elles sont basées sur d’autres concepts de calcul des seuils.

De l’autre côté, des données qui sont issues de la sécurité sociale à partir d’une obligation automatisée puisque tous les logiciels de paie incluent automatiquement et réglementairement la DADS et qui font l’objet de lourdes sanctions fiscales. Les auteurs de la note suggèrent que l’« on peut donc considérer que les DADS offrent un portrait de l’effectif des entreprises difficilement manipulable par l’employeur ».

Les rédacteurs de cette note ont évalué que sur la période 2002-2015 seulement entre 10 à 20 % des entreprises ont déclaré correctement leurs effectifs, qu’entre 50 % à 70 % les sous-déclarent et le reste les surévaluent.

Alors quel intérêt pour les entreprises de sous-déclarer leurs effectifs ?

Les dispositions légales sur le calcul des effectifs sont souvent méconnues. C’est ainsi le cas pour la mise en place ou le maintien des CSE mais aussi pour la participation aux bénéfices des entreprises. En clair, c’est la déclaration des entreprises qui fait foi alors que les textes régissant les seuils d’effectifs ne sont pas utilisés. Ce qui fait dire aux auteurs de la note « Nous suggérons que ce phénomène s’explique par le fait que l’effectif légal est difficile à calculer et n’est pas public, de sorte que le respect de certaines obligations légales dépend en pratique de l’effectif déclaré ».

C’est ainsi que de nombreuses entreprises échappent aux coûts supplémentaires que générerait le passage à 50 salariés alors qu’elles continuent dans la réalité à augmenter leur nombre de salariés. Comment faire comprendre à ces entreprises, au-delà du simple respect de la loi, que la mise en place d’un CE, ou CSE aujourd’hui, ou distribuer de la participation n’est pas un coût pour l’entreprise mais au contraire une chance pour elle de se développer avec des salariés plus épanouis, plus impliqués dans l’entreprise et en définitive plus productifs ?


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