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Les clés du social : La France mise en demeure par la Commission européenne sur le droit au congé annuel en cas de maladie

La France mise en demeure par la Commission européenne sur le droit au congé annuel en cas de maladie

Publié le 30 juillet 2025 / Temps de lecture estimé : 2 mn

Cela pourrait vous concerner ainsi que nombre de vos collègues salariés. Fin juin, la Commission européenne a décidé d’ouvrir une procédure d’infraction contre la France pour manquement aux obligations découlant du droit de l’Union en matière de temps de travail. Ce manquement vise spécifiquement le droit des travailleurs malades pendant leurs congés payés. En fait, pour les salariés, le droit au report des congés payés en cas de maladie, à l’instar de ce qui est déjà prévu dans plusieurs autres États membres de l’Union.

La non-conformité du droit français à la directive sur le temps de travail

La Commission européenne reproche à la France de ne pas garantir, dans sa législation nationale, que « les travailleurs qui tombent malades pendant leur congé annuel puissent récupérer ultérieurement les jours de congé annuel qui ont coïncidé avec leur maladie ». Cette exigence s’appuie sur la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 sur certains aspects de l’aménagement du temps de travail. La directive prévoit un droit au congé annuel payé minimal de quatre semaines et précise, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), que ce droit ne peut être affecté par une période de maladie.

La jurisprudence de la Cour européenne de justice

Ces questions ont déjà été examinées par la Cour et ont donné lieu à une jurisprudence constante, notamment l’arrêt Schultz-Hoff (C-350/06 et C-520/06), selon lequel les salariés continuent d’acquérir des droits à congés payés durant les périodes de maladie. Cette interprétation fait désormais pleinement partie de l’acquis communautaire en matière de santé et de sécurité au travail. Et, la Cour a même précisé que cette règle s’applique que la maladie survienne avant ou pendant le congé.

La situation en France

Dans notre pays, aucune disposition légale ne prévoit la possibilité pour un salarié de reporter ses congés payés dans une telle hypothèse, à moins que cela ne soit prévu par un accord collectif ou par la jurisprudence. Les jours sont considérés comme consommés, même si l’état de santé empêche de profiter réellement du repos. Selon la Commission européenne, cela est contraire aux obligations issues de la directive. Il faut malgré tout signaler la recommandation du ministère du Travail sur la jurisprudence du 18 mai 2022 (Cour de cassation de Versailles n. 19/03230) affirmant que la maladie suspend le cours des congés payés.

Une lettre de mise en demeure

La lettre de mise en demeure adressée par la Commission à la France le 18 juin 2025 marque la première étape de la procédure d’infraction prévue à l’article 258 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). La France dispose désormais d’un délai de deux mois pour répondre aux observations de la Commission et prendre les mesures nécessaires pour se conformer au droit de l’Union. À défaut de réponse satisfaisante, la Commission pourra adresser un avis motivé, seconde étape du processus, et, in fine, saisir la Cour européenne de justice. Ce nouveau signal d’alarme intervient moins de deux ans après les arrêts de la Cour de cassation ayant reconnu l’acquisition de congés payés pendant l’arrêt maladie, alignant partiellement le droit français sur le droit de l’Union.

En guise de conclusion, il est souhaitable que cette procédure d’infraction débouche sur une évolution du droit interne français. Si cela n’était pas le cas, en cas de défausse du législateur, la Cour de cassation pourrait être amenée à se prononcer afin d’assurer la conformité du droit français aux exigences européennes.


Sources