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Tensions et négociations salariales

samedi 5 novembre 2022

Selon le ministère du Travail, les hausses de salaire issues des négociations salariales (NAO) pour l’année 2022 s’élèvent en moyenne autour de 3 %, soit à peine la moitié de l’inflation estimée pour l’instant à 6,1 % sur un an. Aussi, dès que les hausses des prix se sont envolées, les tensions se sont multipliées dans les entreprises dès avant l’été et ont repris depuis la rentrée. Dans une période de tensions également sur les recrutements, par manque d’attractivité ou en raison d’un nombre insuffisant de personnes formées, un certain nombre d’entreprises ou de branches ont rouvert des négociations, allant jusqu’à la signature de nouveaux accords. Si les résultats sont ainsi très décentralisés, donc pas toujours remontés et connus, et de niveau divers, il est cependant intéressant d’essayer d’en faire le bilan actuel.

Tensions et conflits

Ils sont beaucoup plus nombreux. On peut citer nombre de mouvements d’interpellation et de grève à l’Établissement français du sang où les problèmes professionnels s’ajoutaient au problème des salaires. De même avant l’été, il y a eu des débrayages et menaces de débrayages par exemple chez Ryanair, Sopra Steria, Soitec, Marionnaud, ou parmi les éboueurs, les dockers, les routiers, les employés d’Aéroports de Paris, etc.

À la rentrée, on a connu en particulier des mouvements à Carrefour dans les Hauts-de-France les 23 et 24 septembre, chez Stellantis avec des débrayages dans le Nord à partir du 15 septembre et même après l’annonce d’une prime supplémentaire le 27 septembre, chez Orange où le CSE a été houleux le 22 septembre avec la proposition jugée insuffisante d’une augmentation de 3,3 %, ou chez Groupama, Leroy Merlin, Total, Exxon Mobil, Lactalys, ou encore les salariés de l’hospitalisation privée et du médico-social qui ont fait grève le 18 octobre…

Cette liste, loin d’être exhaustive, montre bien un climat de tension sociale sur les salaires.

De nombreuses négociations salariales

Aussi un mouvement de négociations a commencé à se développer, de nombreuses sont en cours, mais déjà un certain nombre d’accords ont été signés.

 Exemples d’accords de branches

Cnav (150 000 salariés) 3,5 % au 1er octobre 2022
Pharmaciens d’officine 3 % en juillet 2022
Personnel au sol de l’aérien : minima de branche 6 % : 7 premiers niveaux
1 à 5 % : maitrise et cadres
Prévention-sécurité 7,5 % pour les salaires minimaux
Recyclage 4,5 % pour les minima salariaux 1er novembre 2022, soit 7 % sur l’année
Froid Après 3,2 % en début d’année,
Au1er octobre 2022 :
. 2,88 % : 4 premiers niveaux
. 1,7 % : autres niveaux
Énergie 3,3 %, avec un minimum de 80 % par mois, dont :
. 1 % au 1-7-2022
. 2,3 % au 1-1-2023
Transport routier de marchandises Négociation en cours, 6 % possibles au 1er décembre 2022



 Exemples d’accords d’entreprises

Airbus 6,8 % sur 24 mois :
. 3,9 % en juillet 2022
. 2,9 % au 1er juillet 2023
Établissement français du sang 3,5 % + hausse des indemnités d’astreinte + prime mobilité durable
Safran 1 à 3 % selon les niveaux de salaires, en plus des 1,8 % de l’accord d’octobre 2021
Air France 5 % + prime de 1 000 €
Bouygues Environ 6 % pour les + bas salaires
LVMH En plus de la prime de 600 à 1 000 € de janvier 2022, prime de 1 000 à 1 500 € (jusqu’au salaire brut annuel de 60 000 €)
Stellantis Prime supplémentaire jusqu’à 1 400 €
SNCF 6 % en moyenne
Bouygues Prime de la valeur entre 500 et 1 000 € en plus des revalorisations de l’année
soit 6 % au total

On est loin de connaitre l’ensemble, surtout quand il s’agit de Pme ou de Tpe et que cela concerne un plus petit nombre de salariés. Le bilan de la négociation collective pour 2022 qui paraitra au deuxième semestre de 2023 montrera plus précisément l’ampleur du mouvement.

La compréhension de la nécessité pour les salariés de pouvoir faire face à l’inflation, le besoin de garder les salariés pour assurer la production ou les services, celui de ne pas perdre en attractivité voire d’en gagner, la difficulté des recrutements convergent à expliquer ces ouvertures de négociations et accords.

Mais pour l’instant, le mouvement est loin d’être général et de nombreuses entreprises, soit parce qu’elles se débattent elles-mêmes dans les difficultés des hausses de prix de leurs matières premières, énergies, approvisionnements, soit parce qu’elles ne sont pas sensibles aux difficultés et demandes de leurs salariés, n’ont pas encore ouvert de perspectives salariales en rapport avec le niveau de l’inflation.



Après des années de faible évolution salariale depuis la crise financière de 2008, le mouvement de revendications salariales, en lien avec l’inflation, montre un changement dans le comportement des salariés, qui va certainement se retrouver dans les NAO pour 2023. On sait que l’inflation n’a pas les mêmes répercussions pour tous, et a plus de conséquences pour les plus pauvres (hausses alimentaires), les ruraux (hausses de l’énergie) en particulier. Un des critères importants de ces négociations est et sera aussi d’éviter l’aggravation des inégalités.