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Négociation collective en 2021 : peu de changement par rapport aux années précédentes

mercredi 26 octobre 2022

Le ministère du Travail a publié en septembre son rapport annuel sur la négociation collective. Comme les années précédentes, indépendamment des circonstances particulières liées à la crise sanitaire, la négociation collective s’est située à un niveau élevé, notamment dans les entreprises. Là où elles sont présentes, les organisations syndicales signent toujours de façon aussi élevée les accords.

Les négociations interprofessionnelles

Avec un seul accord signé en 2021 (accord sur l’évaluation de la loi sur la formation professionnelle de 2018) et cinq avenants (dont 3 sur l’AGIRC-ARRCO) la négociation interprofessionnelle paraît un peu en retrait par rapport à 2020. Le dialogue social interprofessionnel n’a pourtant pas connu de pause en 2021, contrairement à 2017 et 2018. Ainsi, c’est en 2021 que les partenaires sociaux ont mis au point leur agenda autonome de discussions qui a abouti sur des textes et des communiqués communs en 2022.

Les négociations dans les branches professionnelles

Comme les années précédentes, les données fournies par le bilan sont provisoires puisqu’elles ne prennent pas en compte les textes de 2021 enregistrés après le 15 mars 2022.

En 2021, 1 063 accords ou avenants de branches ont été enregistrés (+5 % par rapport à 2020). C’est un peu moins qu’en 2018 et 2019 mais à un niveau équivalent aux années 2015-2016. L’augmentation de 2021 s’explique en partie par le fait que certaines négociations ont été retardées à cause de la crise du Covid en 2020 et ont débouché sur des accords signés et donc enregistrés par le ministère en 2021.

Six nouvelles conventions collectives nationales ont été signées en 2021. Ces nouvelles conventions sont issues du mouvement de concentration des branches professionnelles engagé maintenant depuis plusieurs années et qui semble s’accélérer. Seulement deux nouvelles conventions avaient été signées en 2019 et en 2020.

Les salaires constituent le premier thème de négociation au niveau de la branche dans un contexte d’augmentation du SMIC lié à l’évolution de l’inflation. 377 avenants salaires ont été signés en 2021 contre 290 en 2020. Les branches professionnelles ont depuis du mal à suivre les évolutions du SMIC. De nombreuses branches connaissent en 2022 de nouveau des minimas de branche inférieurs au Smic.

La plupart des autres thèmes de négociation de branche sont en baisse sensible par rapport à 2020. Il en est ainsi des accords sur la formation professionnelle (185 contre 201), sur la protection sociale (96 contre 139), le temps de travail (78 contre 113), les textes liés à la crise du Covid (13 contre 69) et les textes sur les conditions de la négociation de branche et la conclusion des accords (140 contre 179 en 2020 et 345 en 2019). En dehors de l’impact de la crise du Covid, ces baisses sont essentiellement dues à la fin de l’impact des réformes réalisées après 2017 sur les négociations de branches. En revanche, les négociations sur les classifications (20 textes signés) sont en hausse sensible après des baisses enregistrées après 2016. Le nombre de textes sur les conditions de travail est stable avec 26 textes enregistrés.

Les négociations d’entreprises

97 400 textes ont été enregistrés en 2021 en augmentation de 0,9 % par rapport à 2020. Sur ces textes, 76 820 sont des accords collectifs dont 38 880 signés par des délégués syndicaux, en augmentation de 8 % par rapport à 2020. 44 030 accords ont été enregistrés en dehors de l’épargne salariale. Sur ces textes, 71,2 % ont été signés par des délégués syndicaux. 10,9 % des textes ont été validés par un référendum à la majorité des 2/3 par le personnel.

Dans les entreprises de moins de 50 salariés ce sont ces textes validés à la majorité des 2/3 qui prédominent (40,2 % des textes enregistrés). Cette proportion est toutefois en légère baisse (-1 point par rapport à 2020). Même en baisse de 6,4 points, ce mode de validation des textes par les salariés est de loin le plus utilisé dans les entreprises de moins de 11 salariés (82,6 %). Le nombre de textes adoptés de cette manière (19 950) est tout de même à relativiser au regard du nombre d’entreprises de 1 à 10 salariés (plus d’un million).

Principaux thèmes de négociation

Thème % par rapport au total des accords % d’accords signés par un DS au moins
Épargne salariale 44,4 % 24,9 %
Temps de travail 21,9 % 56,4 %
Salaires et primes 20,0 % 85,9 %
Conditions de travail 7,9 % 75,1 %
Égalité professionnelle 7,4 % 89,8 %
Emploi 4,7 % 83,0 %
Droit syndical 3,4 % 87,0 %
Prévoyance 2,8 % 88,3 %

Tableau réalisé d’après le bilan de la négociation collective 2021 (ministère du Travail)

Les accords sur l’épargne salariale, qui représentent plus de la moitié des accords enregistrés, sont essentiellement (45 %) signés par ratification des 2/3 des salariés. Mis à part le temps de travail (56,4 %), les autres thèmes sont à plus des trois quarts négociés avec des délégués syndicaux (entre 75 à 89 %).

Les accords sur l’épargne salariale concernent principalement les accords d’intéressement (64,1 %).

Le thème « salaires et primes » concerne essentiellement les accords de salaires (2/3). Marquant la fin de la première « prime Macron » instaurée en 2019 à la suite du mouvement des gilets jaunes, le thème des primes ne concerne plus que 25,7 % des accords contre 36,9 % en 2019.

Stabilisation des accords sur le droit syndical alors que les CSE sont en place. Ce thème devrait remonter dans la période 2022/2023 avec le renouvellement de ces instances.
Plus de 2/3 des accords sur les conditions de travail concernent la mise en place du télétravail.
Plus de la moitié des accords sur le temps de travail traitent de l’aménagement du temps de travail (modulation, annualisation ou cycles) alors que la durée collective n’est abordée que dans un accord sur cinq sur ce thème.

Qui signe les accords ?

Les accords interprofessionnels et de branche

C’est la CFDT qui signe le plus d’accords à ce niveau avec un taux de signature (1) de 84,2 %. Elle est suivie par FO (69,6 %), la CFE-CGC (58,9 %), la CFTC (50,1 %) et loin derrière la CGT avec 39,7 %. Cette dernière organisation est en progression par rapport à 2020 (+2,4 pts) mais n’atteint pas le taux de plus de 40 % atteint en 2019 alors qu’elle est représentative comme la CFDT dans plus de 90 % des branches. Le taux de signature progresse à FO (+5 pts) mais baisse pour la CFDT et la CFTC (-3 pts chacune). Cette dernière continue sa baisse depuis plusieurs années maintenant qui est probablement liée à une moindre présence dans les branches professionnelles.

Les accords d’entreprise

Dans l’ensemble toutes les organisations syndicales, même les plus contestataires, signent les accords d’entreprise là où elles sont présentes (voir tableau ci-dessous). C’est la CFDT qui signe le plus d’accords d’entreprise au total mais aussi celle qui signe le plus d’accords là où elle est représentative (93 %), mais juste un peu plus que la CFE-CGC, la CFTC, FO et l’UNSA.

Organisation Taux de signature [1] Propension à signer [2]
CFDT 55,9 % 93,0 %
CFE-CGC 32,8 % 92,2 %
CFTC 19,6 % 91,8 %
CGT 41,8 % 83,7 %
FO 32,2 % 90,1 %
Solidaires 4,3 % 69,6 %
UNSA 9,5 % 90 %

Tableau réalisé d’après le bilan de la négociation collective 2021 (ministère du Travail)

Les textes liés à la crise du COVID dans la négociation collective

Entre mars 2020 et décembre 2021, 42 accords de branche et 12 910 textes d’entreprises liés à la crise du COVID ont été enregistrés au ministère du Travail. Dans les entreprises, l’essentiel des textes ont été signés entre mars et mai 2020. 43,3 % ont été signés par des délégués syndicaux. Ils concernent essentiellement le temps de travail (55,7 % des textes) et plus particulièrement l’aménagement du temps de travail.

Ce bilan de la négociation collective ne montre pas d’évolutions sensibles par rapport aux années précédentes. Il démontre une fois de plus la vigueur de la négociation collective dans les branches professionnelles et dans les entreprises. Au niveau national interprofessionnel, la création de l’agenda autonome et la signature de nouveaux accords interprofessionnels en 2022 montrent la volonté des organisations patronales et syndicales d’affirmer la place primordiale des partenaires sociaux sur les questions sociales. Le dialogue social est une réalité dans de nombreuses entreprises même si encore trop de textes enregistrés émanent de décisions unilatérales de l’employeur ou d’une ratification faite en dehors des organisations syndicales notamment dans les entreprises de moins de 50 salariés.


Source


Notes :

[1Taux de signature : taux d’accords signés par une organisation sur l’ensemble des accords signés.

[2Propension à négocier : taux de signature des accords dans les entreprises où une organisation est représentative.