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Les syndicats sont mieux perçus quand on les côtoie

samedi 4 février 2023

Une étude publiée par la DARES au mois de décembre 2022 montre que, sur la période 2011-2017, les salariés semblent s’être davantage détachés des syndicats au point que quand on leur demande un avis les concernant, ils sont de plus en plus nombreux à ne pas se prononcer. Cette étude montre des différences sensibles entre catégories professionnelles sur la perception qu’ils ont des syndicats même si les « ne se prononcent pas » augmentent de façon homogène. Toutefois, quand les salariés connaissent les syndicats soit parce qu’ils en sont adhérents, soit parce qu’ils les côtoient dans l’établissement où ils travaillent, leur image est plus positive. Cela mérite quelques explications…

Une étude basée essentiellement sur les enquêtes « Réponse » effectuées par la DARES

Régulièrement, la DARES, le service statistiques et études du ministère du Travail, interroge les acteurs de l’entreprise sur les relations entre les salariés et la direction au sein des entreprises. Cette enquête a lieu tous les 6 ans. La dernière date de 2017, la prochaine aura lieu cette année. L’étude de Tristan Haute, maître de conférences à l’Université de Lille, s’appuie essentiellement sur cette dernière enquête pour établir son diagnostic. Il sera donc intéressant de consulter les résultats de la future enquête pour voir si les constatations auront évolué par rapport à 2017. À cette époque, dans les enquêtes et sondages, l’image n’était pas bonne.
Elle s’est améliorée après la crise du Covid mais reste fragile.

Toutefois, comme le souligne l’article de Tristan Haute, la confiance des salariés dans les syndicats est restée globalement constante entre 1978 et 2012. Alors qu’elle a baissé fortement dans les années 80 où elle était tombée à 40 %, elle s’est redressée durant les années 90 pour atteindre 70 % en 2005. En 2015, 59,1 % des salariés estimaient qu’ils avaient besoin de syndicats forts. Mais en 2017, 44,7 % considéraient qu’ils rendaient service aux salariés contre 58,2 % en 2011.

Une apathie croissante vis-à-vis des syndicats entre 2011 et 2017

Ce qui ressort principalement de la démonstration de l’auteur, c’est que le nombre de salariés qui ne se prononcent pas passe de 12,9 % à 22,6 % en 6 ans. Et la progression de ces « non-réponses » touche toutes les catégories professionnelles.

« L’apathie » vis-à-vis des syndicats est plus forte dans certaines catégories : les moins de 25 ans ; les ouvriers-employés ; les non-syndiqués ; les embauchés récemment ou ceux qui ne travaillent pas fréquemment avec d’autres collègues. La progression des non-réponses paraît plus importante chez les jeunes. Ceux-ci sont moins syndiqués, participent moins aux élections professionnelles. On trouve les « non-réponses » chez les salariés du bâtiment, des services et plus largement dans les petits établissements. Dans ces derniers, l’absence ou le caractère éphémère d’une présence syndicale ou encore l’atomisation des salariés expliquent aussi un niveau de « non-réponses » élevé. La progression des « non-réponses » est plus contenue chez les salariés couverts par une représentation du personnel dans leur établissement.

L’explication, qui peut être rassurante mais aussi problématique pour les syndicats, c’est que les salariés ont une opinion sur les syndicats quand ils les côtoient. Leur image est plutôt positive quand ils sont connus mais la progression des « non-réponses » semble suggérer que, dans la période 2011-2017, ils aient été moins présents ou visibles auprès des salariés.

Les avis positifs et négatifs vis-à-vis des syndicats

Quand ils s’expriment, les proportions entre ceux qui donnent des avis positifs vis-à-vis des syndicats et ceux qui expriment des positions inverses évoluent peu. Et les avis positifs dépassent nettement les avis négatifs (entre 5 à 20 points suivant les questions posées). Ces positionnements positifs se retrouvent plus souvent chez les salariés syndiqués et ceux disposant d’une représentation syndicale. Les femmes qui s’expriment sont plus favorables aux syndicats que les hommes. C’est le cas aussi pour les employés-ouvriers, les salariés qui travaillent dans un collectif ou ceux qui ont peur de perdre leur emploi.

A contrario, on trouve le plus souvent des opinions négatives chez les cadres supérieurs ou les salariés qui travaillent beaucoup (plus de 40 heures par semaine). Quand ils s’expriment, ils sont plus nombreux à avoir une opinion négative dans les petites entreprises, le bâtiment ou le secteur des services. Des secteurs où la proximité immédiate avec l’employeur, pas toujours complaisant vis-à-vis du syndicalisme, est la plus forte.

Cette étude, même si elle date un peu, confirme donc que la proximité est un enjeu fondamental pour le syndicalisme. Et cette problématique ne date pas d’hier. Les salariés ont besoin d’une représentation du personnel et de militants proches de leurs préoccupations et de leurs difficultés. Quand il n’y en a pas ou qu’ils sont trop éloignés, les salariés ont une image négative mais surtout, presque pire, n’ont pas d’opinion sur les syndicats. Une sorte de détachement qui peut expliquer probablement l’abstention forte aux élections TPE mais aussi la baisse de la participation à celles de la fonction publique ou dans le privé même si elle est la plus modérée. La réforme des institutions représentatives du personnel qui est antérieure à l’enquête Réponse qui a servi de support à cette étude pourrait encore aggraver la situation. Toutefois, entre-temps l’image des syndicats semble s’être un peu redressée dans les sondages d’opinion. La prochaine enquête devrait être très instructive.


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