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Congrès de la CFTC : Changement de Président mais pas de changement de cap

samedi 30 novembre 2019

La CFTC a tenu son congrès du 5 au 8 novembre 2019 à Marseille réunissant un millier de participants (délégués et invités). Le nouveau président Cyril Chabanier et une nouvelle équipe ont été élus dans un large consensus. De même, la ligne réformiste assumée par la centrale qui revendique ses 100 ans d’existence a été largement confirmée. Si les valeurs sociales chrétiennes restent une « boussole » pour le nouveau président, « elles ne constituent pas une fin en soi ! » a-t-il relativisé devant la presse.

Une succession sans problème

La filiation entre le président sortant Philippe Louis et le nouveau président est évidente : même vision du syndicalisme, même approche sur les valeurs. S’il a vingt ans de moins et la volonté d’être plus percutant que son prédécesseur, sa façon d’être et son expression paraissent être dans la continuité de ses prédécesseurs.

« Nous ne manquons pas d’idées »

C’est un président sortant plutôt satisfait de son bilan qui est intervenu pour la dernière fois devant les délégués du Congrès. « Nous ne manquons pas d’idées ! » a-t-il déclaré au risque de s’attribuer quelquefois des résultats obtenus avec d’autres. La CFTC se prévaut d’avoir été la première à parler des changements climatiques et numériques et la première à revendiquer un nouveau contrat social qu’il faut maintenant traduire en actes. C’est pourquoi elle s’est investie avec d’autres organisations dans le « Pacte du pouvoir de vivre ».

Montrant l’implication de son organisation dans les réformes, Philippe Louis n’a pas hésité à déclarer que « la CFTC modèle le modèle social autant que la société modèle la CFTC ». Une manière de dire que par le dialogue et la négociation « ont fait davantage bouger les lignes qu’en s’opposant frontalement » mais aussi que la CFTC évolue avec son temps.

Le président a ensuite souligné les progressions électorales de la CFTC et la progression de son nombre d’adhérents même si celles-ci restent modestes. Ainsi, la CFTC a progressé de 0,22 point sur la dernière mesure de la représentativité en restant en dessous des 10 % (derrière la CFE-CGC qui l’a dépassée) et annonce une augmentation de 10 000 adhérents entre les deux derniers congrès. La CFTC revendique 134 667 adhérents en 2017.

Illustrant les propos de son président, Bernard Sagez, secrétaire général sortant lui aussi, a présenté le rapport d’activité en quatre parties : Tout travail mérite un droit social ; Écologie et numérique ; Les lois travail ; Dynamique intense et ouverture vers l’extérieur. Principalement au menu de sa présentation, les retraites complémentaires, la réforme systémique des retraites, l’assurance chômage, la revendication d’un régime universel d’activité, la conciliation objectifs sociaux et écologiques, la loi Pacte et le télétravail. Autant de sujets sur lesquels la CFTC a tenté de peser avec plus ou moins de succès. Ainsi, il a explicité l’attitude de la CFTC sur les lois travail en participant aux concertations avec le gouvernement plutôt que par la confrontation. En désaccord sur le renvoi au tout entreprise, elle a, selon lui, tout de même obtenu la reconnaissance de la branche dans les ordonnances Macron. Le secrétaire général a souligné l’importance du changement constitué par la mise en place des CSE tout en regrettant que globalement les entreprises n’aient pas joué le jeu du dialogue social.

Allant dans le même sens que le président, Bernard Sagez a mis en valeur quelques bons résultats électoraux de la CFTC notamment aux élections TPE et plus récemment dans les chambres d’agriculture (22 % en 2019 soit +9 points). Il fait même état d’un ratio entre le nombre d’électeurs et le nombre d’adhérents qui montrerait une CFTC plus attractive que les autres puisque, selon lui, elle obtiendrait 3,64 électeurs pour 1 adhérent contre 1,79 pour la CGT et 1,52 pour la CFDT.

Il souligne enfin le développement du numérique dans l’organisation notamment au travers de la mise en place d’un outil de e-formation à destination des militants et adhérents de la CFTC mais toutefois insuffisamment utilisé.

Satisfecit donc pour le secrétaire général de la CFTC et le président sortant. Les militants surnommés « identitaires » c’est-à-dire attachés aux valeurs chrétiennes traditionnelles, notamment Jacques Thouvenel (vice-président sortant), n’ont que très peu pesé dans les débats. Seule expression forte sur la défense des valeurs socio-chrétiennes, celle d’Alain Deleu lors de la commémoration du centenaire de la CFTC. Il a ainsi demandé, comme les identitaires, que celles-ci soient abordées dans les formations syndicales.

Le bilan de la direction sortante de la centrale a été largement approuvé par les délégués au congrès puisque le rapport d’activité a été voté avec 79 % des mandats.

Des orientations encore plus consensuelles

Votées à main levée à la quasi-unanimité, les orientations pour le nouveau mandat que la nouvelle équipe aura à mettre en œuvre sont dans la continuité des textes précédents. Elles confirment la ligne réformiste de la CFTC autour des valeurs sociales chrétiennes qui, si elles constituent une boussole, ne sont pas une fin en soi. Celles-ci se traduisent pour le rapporteur de la résolution, Cyril Chabanier, par trois principes : dignité de la personne, dialogue social et esprit constructif.

Les grands axes revendicatifs de la CFTC

Le travail est au centre d’un premier ensemble de revendications qui touche les rémunérations, le logement au travers d’Action logement, la qualité de vie au travail, en souhaitant une nouvelle négociation, la RSE, l’emploi et la formation professionnelle avec la nouvelle loi « qui nous oblige à être innovants ». La CFTC revendique aussi ce qu’elle appelle le « régime social universel d’activité » qui permettrait d’accompagner le travailleur toute sa vie professionnelle quel que soit son statut.

Sur la réforme des retraites, soulignons le soutien apporté au principe du régime universel de retraite tout en restant vigilant dans la phase de concertation sur le projet de loi autour de quelques principes : répartition, conservation des droits acquis, prise en compte des situations familiales (1er enfant et familles nombreuses, réversion), reconnaissance des activités à forte valeur sociale et âge de départ maintenu à 62 ans. Plus largement en matière de retraite, la CFTC revendique l’indexation des pensions sur l’inflation et la non-différenciation de l’indexation selon les revenus.

Si la CFTC revendique l’approfondissement du dialogue social, Cyril Chabanier considère la mise en place des CSE comme une occasion manquée. Mais se voulant pragmatique, la CFTC encourage ses militants à s’approprier les réformes et à en tirer le meilleur pour repenser le dialogue social dans les entreprises.

La CFTC est particulièrement impliquée dans le Pacte pour le pouvoir de vivre. Elle ne veut pas œuvrer seule pour un nouveau contrat social et considère qu’ensemble les 50 organisations signataires du Pacte représentent un nombre « colossal » d’adhérents et donc d’électeurs, ce qui leur confère un poids considérable.

Un syndicat qui se veut au service des travailleurs

Sur le plan de l’action syndicale, sans surprise, l’accent est mis sur le dialogue. Cyril Chabanier résume par « négociation, médiation et en dernier recours la grève » la méthode CFTC. Il encourage les militants CFTC à faire preuve de proximité avec les travailleurs, d’ouverture aux autres, d’indépendance d’esprit et à avoir une attitude positive dans la négociation.

De syndicat de service, il voudrait faire de la CFTC un « syndicat au service » avec des actes conformes aux paroles. Pour cela, il souhaite être plus visible « on va travailler pour ça ! » a-t-il déclaré. L’application pour smartphone que la CFTC vient de mettre en place à destination de ses militants devrait favoriser la communication en interne.

L’objectif recherché est l’augmentation du nombre d’adhérents que Cyril Chabanier considère insuffisante actuellement. Il s’agit de créer une nouvelle dynamique qui « projette la CFTC dans l’avenir ».

Une équipe dirigeante fortement renouvelée

Avec 6 femmes sur 15 membres, la nouvelle équipe dirigeante de la CFTC est plus féminisée mais n’atteint toutefois pas la parité. Cette équipe est aussi rajeunie avec 7 militants et militants de moins de 48 ans dont le président (46 ans) et le secrétaire général confédéral Eric Heitz (47 ans). Celui-ci est issu de la métallurgie et de la région Grand-Est. Cyril Chabanier, statisticien à la CNAF, était président de la fédération de la protection sociale avant de devenir président confédéral élu avec près de 90 % des mandats.

Le Conseil confédéral (le parlement de la CFTC) est composé de membres élus, de représentants des fédérations, des unions régionales, d’une personne qualifiée (président de la CNAF) et de trois secrétaires confédéraux (dont Joseph Thouvenel) : 74 membres dont 29 femmes (une dizaine de plus que lors du dernier mandat).

L’avenir de la CFTC

Même si son nouveau président a rappelé que les 8 % de représentativité n’étaient pas acquis, les responsables CFTC semblent plutôt penser que la représentativité de la CFTC au niveau national ne sera remise pas en cause lors de la prochaine mesure (cycle 2017-2020). Ils veulent même croire à une nouvelle progression de la CFTC. Qu’en sera-t-il dans les faits ? Une communication plus forte et une équipe nationale plus jeune et féminisée seront-ils des atouts suffisants pour convaincre les salariés alors que la référence chrétienne fait principalement l’originalité de la centrale et donc « sa raison d’exister » comme l’a souligné Alain Deleu dans son allocution sur le centenaire ?

Bureau Confédéral :
Président Cyril : Chabannier ;
Secrétaire général : Eric Heitz ;
Trésorière : Isabelle Therrain ;
Vice-Présidente et Vice-Présidents : Pascale Coton, Joseph Crespo, Patrick Ertz, Francis Orosco ;
Secrétaires générales adjointes : Anne Chatain ; Christine Lecerf ; Annie Toudic ;
Secrétaire Général adjoint : Jean-Michel Tessier ;
Trésorier adjoint : Manuel Lecomte ;
Membres du Bureau : Guillaume Cadart, Frédéric Fischbach et Imane Harraoui

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Sources