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Quel avenir pour l’automobile en France ?

mercredi 14 juillet 2021

Face au risque réel de désindustrialisation, avec la fin de la vente des véhicules diesel et essence, le secteur automobile se trouve à un carrefour. Constructeurs, équipementiers, sous-traitants doivent accélérer la transition écologique du secteur. La transition juste passe par une sécurisation des parcours professionnels, une formation continue qui doit accompagner massivement ces mutations, affirment la Fondation Nicolas Hulot et la CFDT métallurgie dans un rapport (juin 2021) qui fait le bilan d’un an de travail avec l’aide du cabinet Syndex et des équipes sur le terrain, en mettant 4 scénarios en évidence. Ils proposent la mise en place d’États généraux de l’automobile.

Objectifs pour 2035

  • Une transition écologique assumée : accélération de l’électrique avec un objectif 100 % véhicules neufs zéro émission et un cap vers la sobriété de la production et des usages.
  • Une restructuration de l’appareil productif du secteur autour de l’électromobilité pour maintenir l’activité industrielle en France et y produire 2,3 millions de moteurs pour 2 millions de véhicules assemblés et 100 GW de production de batteries en 2035.

Nécessité d’enrayer le déclin de la filière moteur et avoir un gain de 4 points sur les emplois maintenus en 2030. Mise en place d’États généraux de l’automobile pour mobiliser de nouveaux leviers de politiques publiques pour les salariés et les territoires.

  • Créer les conditions de la relocalisation : deal engageant entreprises et gouvernement en faveur du made in France.
  • Accompagner dès maintenant tous les salariés quel que soit leur statut vers les dispositifs de formation et de reconversion : préparer les compétences pour la filière de demain tournée vers l’électrique et le digital.
  • Oser une gouvernance ouverte en faveur d’une relocalisation.

L’enquête faite par le cabinet Syndex repose sur une méthode d’analyse quantitative et qualitative. Elle est issue de données statistiques et d’informations recueillies auprès des acteurs de l’industrie de l’automobile de 136 sites en France :

  • Prise en compte des nouvelles activités : production de batteries de traction, le recyclage et le rétrofit.
  • Le secteur de l’énergie est en interaction croissante avec le secteur de la métallurgie.
  • Les emplois dans la filière moteur doivent être mis en perspective avec la filière automobile qui rassemble les activités industrielles (400 000 emplois) et les activités de service (400 000 emplois en France).

Le rapport établit quatre scénarios contrastés :

  • Le premier scénario avec la prolongation des tendances actuelles se traduit par une baisse de 70 % des effectifs d’ici 2050.
  • Le deuxième avec la politique de relance initiée en 2020 ne permet pas de répondre au défi climatique (fin de vente des véhicules diesel et essence en 2040), ni de mettre un terme aux délocalisations (en 2050, la division par deux est inéluctable).
  • Le troisième avec un plan plus ambitieux de relance met en lumière l’impasse d’une vision purement productiviste sans anticiper les besoins de sobriété (réduction des consommations d’énergie…).
  • Le quatrième scénario pour « une transition juste » intègre les exigences de sobriété et mise sur une intégration locale renforcée de la filière. Il vise la restructuration de l’appareil productif autour de l’électromobilité dans une optique de réindustrialisation.

Le quatrième scénario pour « une transition juste » repose sur un double objectif : conserver une industrie automobile sur le territoire national et lui donner les moyens de répondre de manière adaptée aux besoins de mobilité de demain dans un monde décarboné. Il démontre qu’en s’engageant dans la transition écologique, la filière automobile peut (re)localiser ses approvisionnements, dynamiser l’activité et créer de l’emploi. Ce scénario de transition suppose de rompre avec une certaine vision de l’industrie et des politiques économiques, en négociant un nouveau deal pour l’industrie automobile :

  • Saisir les opportunités liées à la transition écologique. En 2030-2035 : Batteries (jusqu’à 15 000 emplois), Recyclage (jusqu’à 9 000 emplois), Rétrofit (jusqu’à 5 275 emplois), Vélo (1 million d’euro de CA génère près de 10 emplois soit 3 fois plus que dans l’automobile), bornes de recharge électrique, services de voitures partagées, gestion des données de mobilité.
  • Évaluer précisément les besoins d’accompagnement des salariés. La fabrication de moteurs électriques requiert 60 % de main-d’œuvre en moins par rapport à un diesel, 40 % par rapport à un essence. Dans la filière moteur, 10 000 emplois sont concernés dans les 5 années à venir, 16 000 d’ici 2030. Il est impératif de former les salariés à de nouvelles compétences, d’anticiper les besoins futurs.
  • Créer les conditions de la relocalisation. Mettre en place des socio-éco-conditionnalités des aides publiques (limiter les délocalisations, accélérer la transition écologique, favoriser une plus grande solidarité au sein de la filière). Mobiliser les acteurs en faveur du made in France. Définir des normes sur les niveaux d’émissions des véhicules et des batteries, sur l’ensemble du cycle de vie. Mettre en place des mesures financières de soutien à l’innovation.
  • Rehausser les standards CO2 européens et mettre fin à la prime aux véhicules lourds. Activer le levier de commande publique au niveau européen.
  • Accompagner tous les salariés dès maintenant : anticiper pour protéger les salariés et préserver les savoir-faire. Encourager et accompagner la transition des entreprises et des sites menacés. Respecter les parcours et ne laisser personne sur le bord de la route.
  • Oser une gouvernance ouverte : renforcer la représentation des salariés dans les conseils d’administration des entreprises, mettre en place des conférences sociales régionales pour piloter les transitions industrielles.

La fin des moteurs thermiques crée des défis sociaux, industriels et technologiques. Ce rapport pour une « transition juste » fournit une analyse du secteur et se veut force de propositions pour une transition écologique des entreprises de la filière automobile en France, avec un accompagnement pour tous les salariés, quel que soit leur statut. Pour l’observatoire de la métallurgie, 100 000 emplois pourraient être détruits en France d’ici 2035 chez les équipementiers qui emploient 190 000 salariés. En Allemagne, le syndicat IG Metall plaide pour la création d’un fonds d’investissement européen (voir Clés du social [1]).


Référence