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Offre de formation pour les allocataires de RSA

mercredi 21 septembre 2022

Une expérimentation de formation PEE (parcours d’entrée dans l’emploi) habituellement réservé aux jeunes « neet » (ni en emploi, ni en formation) a été élargie aux allocataires du RSA dans le cadre des Pactes régionaux (2019-2021). Dans l’évaluation qualitative de la région Île-de-France, trois grandes questions ont été identifiées : celle de la gouvernance du dispositif à la fois transversal et multi-niveau, celle de l’accès des allocataires du RSA à des parcours de formation adaptés, celle de la mobilisation des employeurs pour l’insertion de ce public.

Méthode de l’étude : une approche qualitative à caractère monographique sur la base d’entretiens individuels permettant de croiser les regards des acteurs parties prenantes, (plus de 80 professionnels et 50 stagiaires), soit :

  • Les partenaires institutionnels et stratégiques (Pôle emploi, Conseils départementaux, délégation territoriale régionale) ;
  • Les organismes de formation (direction, encadrement intermédiaire, formateurs) ;
  • Les partenaires locaux (associations, maisons de l’emploi, plans locaux pour l’insertion et l’emploi, etc…) ;
  • Les entreprises du groupement ainsi que les stagiaires inscrits en PEE.

L’ouverture du PEE aux allocataires du RSA a soulevé des difficultés de gouvernance territoriale. Pour la Région, cette extension du PEE n’était pas prioritaire, elle s’y est peu investie. Le déploiement de l’expérimentation a buté sur plusieurs difficultés :

  • L’absence de concertation quant au public susceptible d’être orienté vers les parcours PEE a contribué à exclure des allocataires en accompagnement social suivis par les services du Conseil départemental ou par des associations.
  • L’entrée statutaire dans le dispositif a posé un problème aux conseillers de Pôle emploi, attachés au droit commun.
  • L’absence de coordination de l’offre de formation entre la Région et les départements a pu faire dire à certains acteurs que le PEE était redondant ou entrait en concurrence avec les dispositifs départementaux.

L’insuffisante sensibilisation au PEE des référents institutionnels n’a pas permis aux publics les moins informés et motivés de s’inscrire sur cette action de formation : communication peu lisible, manque de référents du public RSA, manque d’intermédiation entre l’offre et le public…Un nombre important de stagiaires ont accédé au PEE par le bouche-à-oreille. Seulement 38 % des places réservées aux allocataires du RSA avaient été occupées :

  • C’est en définitive aux organismes (privés) de formation qu’a incombé la responsabilité « d’animer le partenariat et d’assurer la coordination des partenaires extérieurs au groupement ».
  • Cette responsabilité n’a pas été valorisée financièrement dans le cadre des marchés publics.

Une sécurisation des parcours des allocataires qui demeure insuffisante : auparavant les parcours s’appuyaient sur des partenariats avec des centres de formation d’apprentis qui n’étaient pas accessibles à un public adulte de plus de 30 ans. La sécurisation des parcours PEE-RSA s’est heurtée à la difficulté de mobilisation des employeurs dans des parcours d’insertion et de formation.

La question de la rémunération des allocataires a représenté un frein à l’accès au PEE : les professionnels accompagnant les allocataires ne maitrisaient pas la complexité des situations individuelles. Une entrée en PEE pouvait signifier une baisse de niveau de vie (pertes d’aides sociales connexes, frais de déplacements, modes de garde…).

Les formateurs soulignent la nécessité de proposer un accompagnement « global » pendant la formation, c’est-à-dire d’intégrer à l’accompagnement en formation un accompagnement social afin de sécuriser les parcours d’un public précaire :

  • Les référents sociaux des allocataires du RSA, lorsqu’ils ont été identifiés, n’ont pas constitué un relais pour traiter des difficultés sociales pendant l’action de formation en raison de leur faible disponibilité.
  • Lorsque les formateurs ont pris en charge l’accompagnement social pendant l’action, ils ont regretté l’absence de reconnaissance de leur implication.
  • Le manque de légitimité des formateurs dans le champ social les a souvent empêchés d’actionner efficacement certains leviers ou de trouver des relais auprès des structures de droit commun.

Les parcours PEE semblent atteindre l’objectif prôné de proposer des parcours sur-mesure. La pédagogie des PEE apparait répondre aux besoins des allocataires du RSA :

  • Les formateurs font part de stratégies construites pour encourager la persévérance d’un public mal à l’aise avec un format scolaire ou trop « descendant ».
  • Ils soulignent l’importance de s’autoriser un décalage dans leur posture de formateurs et la nécessité de construire le programme au fil de l’eau en encourageant l’interactivité.
  • De construire des ateliers moins conventionnels (sorties culturelles, accompagnement dans les transports en commun, sophrologie, confiance en soi, etc…).

Une action à l’ingénierie adaptée à des publics considérés comme fragiles : cette action a facilité la coopération entre des acteurs classiquement concurrents, cela a permis d’améliorer le maillage territorial des actions de formation et d’accroître la diversité des parcours proposés.

L’expérimentation interroge plus généralement le modèle économique de l’action PEE : le type de financement retenu (heure stagiaire), la recherche d’un coût toujours moins élevé (entre 6 et 7 euros de l’heure), la mise en concurrence des organismes de formation, les primes incitatives versées en fonction des « sorties positives » présentent le risque de mener une logique misant sur le placement rapide des stagiaires plutôt que sur l’élaboration d’un projet professionnel :

  • L’expérimentation interroge le modèle de financement des organismes de formation accompagnant des publics fragiles.
  • Le PEE constitue une action d’insertion pour laquelle le paiement en heures stagiaire ne semble ni pertinent ni adapté.
  • L’articulation des compétences institutionnelles entre Conseil régional (action de formation) et Conseils départementaux (accompagnement social) n’a été que peu travaillée.
  • Les départements sont peu repérés comme partie prenante des PIC (plans d’investissement dans les compétences) et des Pactes régionaux d’investissement dans les compétences, bien qu’ils accompagnent des demandeurs d’emploi en difficultés. L’articulation des compétences territoriales nécessiterait que les collectivités travaillent sur la complémentarité de leurs offres mutuelles.

Les stagiaires se sont déclarés majoritairement satisfaits du PEE. Les sorties positives s’élèvent à 41 % (21 % en emploi et 20 % en formation). Le PEE apparaît adapté aux allocataires du RSA à 3 titres. Il permet un enclenchement rapide du parcours, une pédagogie ajustée aux besoins d’un public en difficulté, il offre un accompagnement global ou intégré.

Pour cette expérience, faute d’instance de coordination du dispositif PEE, le décloisonnement institutionnel espéré n’a pas eu lieu. Sensibiliser les professionnels qui accompagnent et orientent les publics (conseillers de Pôle emploi, travailleurs sociaux des CCAS, des départements, des conseillers en insertion des Plie (plan local insertion emploi), etc…) s’avère nécessaire pour favoriser l’accès à la formation des publics fragiles.


Références :