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Numérique : créer un droit du travail et assurer son développement économique

mercredi 20 avril 2016

La transformation du travail par le développement du numérique choque avec les règles économiques et sociales créées de la révolution industrielle à la 2ème moitié du XXème siècle, dans un contexte économique bien différent. Aux entreprises poids lourds et aux petites entreprises, les deux groupes ancrés dans une structuration datée assortie d’une certaine stabilité, commence à se substituer un fonctionnement en réseau et en évolution permanente, même si cela ne fait pas disparaitre les grands groupes. Les formes de travail se complexifient, se différencient.

Le projet de loi travail aborde certains aspects de cette problématique. S’ils semblent peu appelés à évoluer, il faudra attendre la fin des débats parlementaires pour y voir complètement clair.

1. Loi travail : volet numérique

À partir du rapport Mettling [1] et de celui du Conseil national du numérique (CNNum), le projet de loi Travail devrait comprendre des mesures concernant le numérique dans le travail et le dialogue social : des droits nouveaux, un projet de négociation et des mesures pratiques.

Création du droit à la déconnexion

Il était revendiqué depuis longtemps par les organisations syndicales, en particulier cadres, pour maîtriser l’intrusion des technologies numériques du travail jusque dans la vie privée.

Applicable au 1er janvier 2018, ses modalités feront partie de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail. En l’absence d’accord, l’employeur fixera les modalités. Et pour les entreprises de 300 salariés et plus, il devra élaborer une charte qui sera soumise à la consultation des IRP.

Concertation et/ou négociation sur le télétravail

Cet article bref prévoit l’ouverture d’une concertation avant le 1er octobre sur le télétravail et le travail à distance, que les partenaires sociaux pourront transformer en négociation.

Mesures pratiques pour le dialogue social

Cet article vise deux aspects :
 les possibilités d’usage par les syndicats de l’intranet et de la messagerie de l’entreprise ;
 la possibilité de vote électronique pour les élections professionnelles dans l’entreprise ;
Les deux sans qu’un accord d’entreprise préalable soit nécessaire.

Ces premières mesures constituent la création d’une ébauche de droit du travail lié à la diffusion du numérique pour les salariés. Aspect très important ! Mais il reste beaucoup d’autres aspects à traiter quand beaucoup du travail numérique se déroule hors du contexte salarié et quand la compétition internationale s’intensifie sur le développement - voire la suprématie - de cette nouvelle économie.

2. Économie du numérique : le rapport du CNNum

En 2014, le ministère du travail a demandé au CNNum des propositions sur les besoins en métiers, compétences, sur le numérique dans les services de l’emploi et les conséquences du numérique sur le travail et les conditions de travail.

Synthétiquement, ce rapport remis en janvier 2016 comporte :

5 objectifs

  • Valoriser les parcours hybrides ;
  • Transformer les organisations pour en faire des lieux d’émancipation et d’apprentissage ;
  • Recréer du collectif pour tous et à toutes les échelles ;
  • Repenser la relation de travail et la redistribution des richesses ;
  • Mettre en valeur les capacités, les initiatives, les expérimentations, tant dans l’entreprise et administration que dans l’action publique.

20 propositions

 On y trouve bien sûr la mise en place du CPA [2], mais aussi la promotion des parcours hybrides et pluriactifs, dont le travail en temps partagé ; avec une sécurisation des transitions professionnelles, entre public et privé, entre salarié et travail indépendant ; et une protection réelle pour les indépendants ; ainsi que la mise à l’étude du projet de revenu de base (ou allocation universelle [3]) ;

 Il préconise de soutenir les formes alternatives de collectifs de travail, en particulier le développement des formes de coopératives ; de favoriser le bénévolat ; d’encadrer les plateformes de l’économie collaborative ; et de faire que l’ensemble des activités marchandes du numérique soient incluses dans le prélèvement de l’impôt ;

 Il propose de développer des formes de management plus collaboratives, pour redonner sens et envie au travail : en renforçant le management horizontal, au contraire du management autoritaire vertical ;

 Il pense indispensable de développer une politique ambitieuse de recherche, d’éducation, de formation professionnelle, moderniser la conception de la formation professionnelle (modules personnalisés, réseaux d’échanges, acteurs de l’innovation sociale…), simplifier la VAE, développer la GPEC territoriale en travaillant sur les nouveaux besoins de métiers du bassin d’emploi ; et d’améliorer les services publics d’orientation, de reconversion et d’emploi ;

 Enfin, il recommande de redynamiser le dialogue social, grâce au numérique ; d’y donner une place réelle aux nouvelles problématiques tels l’équilibre vie professionnelle-vie privée, le partage de l’information, y compris sur la gestion de l’entreprise ; et d’inventer de nouvelles formes de dialogue social, en plus de la branche et de l’entreprise, au niveau territorial, ou d’un projet, ou d’un écosystème.

Ces propositions doivent servir à développer la société numérique en intégrant tout le monde et en permettant à chacun d’y trouver sa place et d’y développer ses potentialités.


Sources

Avant-projet de loi travail