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La revanche des villes moyennes ?

mercredi 20 avril 2022

Si on lit les journaux ou que l’on écoute les informations, depuis la pandémie, les villes moyennes sont devenues l’Eldorado de nombreux Français en quête de proximité, d’équilibre et de qualité de vie. Si ce portrait positif est vrai pour certains cas, deux études récentes de France Stratégie relativisent en partie cette vision en mettant en avant les fortes variations suivant les territoires. Les études soulignent aussi que les villes moyennes ont été pendant longtemps « un angle mort » de la politique d’aménagement du territoire et que la période actuelle offre de bonnes opportunités pour mettre fin à cette situation. Cinq axes d’amélioration sont présentés.

Le poids de villes moyennes

Les villes moyennes représentent 35 % de la population et 30 % de l’emploi salarié. Ce qui les caractérise en général c’est qu’elles disposent d’un bon équilibre entre les fonctions de centralité (services et commerces), de mixité sociale et ont en général un cadre de vie agréable souvent plus proche de la nature. Leurs dynamiques sont très différentes mais la période qui s’ouvre pourrait entrainer de nombreuses opportunités pour une majorité d’entre elles. Une forme de retour en grâce même si les chercheurs tempèrent les images d’« exode urbain » parfois décrits.

Un tableau hétérogène

Pour France Stratégie, les villes moyennes ne sont pas une « strate homogène » au « destin commun ». 202 villes ont été observées. À partir de trois indicateurs (démographie, emploi et prix de l’immobilier), les études identifient quatre catégories : les villes dynamiques (42 % : littoral atlantique, pourtour méditerranéen, vallée du Rhône, zone frontalière avec la Suisse), les villes comparables aux tendances nationales (27 % : littoral breton, est, centre, nord), les villes en retrait (16 % : centre et quart nord-est) et les villes atypiques aux profils contrastés (14 % : Normandie, nord et est).

Si on relève une légère augmentation des créations d’emplois (+ 2,3 %) entre le troisième trimestre 2019 et le troisième trimestre 2021, les études font le distinguo entre les villes déjà sur une trajectoire positive (Quimper, Thonon-les-Bains, Sète…), de celles dont le rebond est plus récent (Nevers, Vierzon…) ou celles qui connaissent une forme de déclin sur la longue durée comme Dieppe, Longwy ou Saint-Dizier.

L’éclairage de l’immobilier

On constate une activité immobilière frémissante en général, importante dans certaines zones mais, dans le détail, seules 65 des 202 villes moyennes examinées par France Stratégie ont vu leurs prix de l’immobilier augmenter plus vite que la moyenne nationale comme à Bayonne, Les Sables d’Olonne, Royan. Les tendances du marché immobilier local se sont récemment inversées pour neuf d’entre elles dont Cahors et Maubeuge alors qu’Auxerre, Carcassonne ou Tulle rencontrent toujours des difficultés.

Un élément nouveau semble apparaitre

France Stratégie envisage un possible « rattrapage » des centres-villes par rapport à leurs périphéries, sur le modèle des métropoles. Car, jusqu’à présent, la croissance démographique de ces bassins de vie était massivement tirée par les communes périurbaines et les petits villages voisins. Ainsi selon les chercheurs, 45 % des villes moyennes ont même connu, ces dix dernières années, une « croissance de la population de leur couronne, alors que leur pôle urbain connaissait une baisse ».

Un retour en grâce dans l’aménagement du territoire ?

Rappelons d’abord que l’État est intervenu en leur faveur dès 2018 à travers les programmes Action cœur de ville et Territoires d’industrie. Les chercheurs soulignent désormais leur « rôle d’équilibre », de « pivot » dans le système territorial français. Enfin il faut citer aussi comme élément dynamique la vision positive des Français traumatisés par les confinements dans des appartements exigus. L’heure a changé pour des villes qui concentrent de nombreux équipements et services (commerces, culture, éducation, enseignement supérieur, institutions, mobilités, santé, services publics, etc.). C’est ce qui amène les chercheurs à les définir comme des « piliers durables de l’aménagement du territoire ».

Mais, pour que cela soit une réussite

Les quatre chercheurs de France Stratégie suggèrent 5 axes d’amélioration :

  • Différencier les stratégies d’accompagnement selon les villes moyennes en tenant compte de la variété des enjeux auxquelles elles sont confrontées : les défis démographiques (vieillissement), économiques (télétravail), environnementaux (étalement urbain), sociaux (gentrification, cohésion sociale)…
  • Mobiliser et adapter les dispositifs de politiques publiques existants.
  • Consolider et pérenniser l’accès à une base minimale d’équipements et de services dans les villes moyennes notamment en matière d’offre de santé, d’éducation, d’enseignement supérieur et recherche et de mobilité.
  • Renforcer l’analyse territoriale.
  • Développer la vision prospective et les capacités d’ingénierie dans les villes moyennes.

Enfin, il convient de ne pas oublier que cet attrait nouveau n’empêche pas qu’une partie de la population de ces territoires ressent un profond mal-être et parfois se sent abandonnée.


Sources