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Conflits de valeurs et santé au travail

samedi 4 septembre 2021

Six actifs sur dix révèlent être exposés plus ou moins souvent à des conflits de valeurs au travail, et ceci selon cinq types de situations d’exposition. Telles sont les conclusions d’une étude de la Dares parue en mai 2021. Quels sont les principaux conflits de valeurs rencontrés par les travailleurs ? Dans quelles situations de travail se développent-ils plus facilement ? Et quelles sont leurs conséquences sur la santé ?

Les 6 profils d’exposition aux conflits de valeurs

En % du total des actifs
Pas ou peu concernés par des conflits de valeurs 40
Rencontrent des conflits éthiques sur les choses à faire 18
Fierté du travail mais insuffisance de moyens 12
Ressentent leur travail comme inutile 11
Un travail qui manque de sens et de qualité 8
Cumul de conflits de valeurs 11



 Ainsi, seuls 4 travailleurs sur 10 ne se sentent pas ou peu concernés par des conflits de valeurs.
Cela concerne des assistantes maternelles, des conducteurs de véhicules, des coiffeurs, des ouvriers de second œuvre du bâtiment, les aides à domicile, les bouchers, charcutiers ou boulangers.
Beaucoup de ces actifs sont en contrat précaire, 30 % sont de jeunes apprentis ou stagiaires, travailleurs en contrats aidés ou en CDD. Mais on y trouve aussi beaucoup d’hommes, les plus de 50 ans, les travailleurs indépendants.

Les 5 profils exposés aux conflits de valeurs au travail

 2 actifs sur 10 rencontrent des conflits éthiques dans leur travail, même s’ils ont les moyens de travailler. Ils désapprouvent certaines tâches qu’ils doivent accomplir (92 % d’entre eux), comme devoir mentir à des clients, patients ou usagers (63 %), faire des choses « inutiles ou dégradantes » (51 %), etc. Cela leur donne la certitude de ne pas faire du bon travail (83 %).
Leur profil est souvent celui d’hommes, ouvriers non qualifiés, en particulier dans les hôpitaux. On trouve aussi des infirmiers, sages-femmes, agriculteurs, pompiers, militaires, agents de sécurité mais aussi des cadres de la bancassurance et des dirigeants d’entreprise.
Ils sont plus souvent que la moyenne en situation précaire ou incertaine, s’estiment souvent mal payés, et travaillent plus souvent au contact avec le public et ¼ d’entre eux se plaignent d’agression verbale de la part du public.

 1 sur 10 manque de moyens pour faire correctement son travail ; même si ces actifs ont le sentiment d’un travail utile et la fierté du travail bien fait. Mais ils ne peuvent assurer la qualité qu’ils souhaitent (68 % d’entre eux) et, même chiffre, doivent faire des choses qui ne sont pas de leur ressort.
Ces conflits se rencontrent notamment parmi les enseignants, travailleurs de l’action sociale ou de l’orientation, infirmiers et sages-femmes ou professions paramédicales, techniciens de l’informatique.
Ce sont souvent des femmes de la quarantaine, des salariés stables, des cadres ou professions intermédiaires, des agents de la fonction publique (enseignement et santé surtout). Ils s’estiment mal payés.

 1 sur 10 pense son travail inutile, même avec les moyens pour bien le faire. Parmi eux, 59 % n’ont presque jamais la fierté du travail bien fait.
On les retrouve dans les métiers de la mécanique, de la manutention, de l’électricité et électronique, dans les emplois administratifs d’entreprise ou dans la vente.
Ce sont plus souvent des hommes, des ouvriers et des intérimaires.

 1 sur 10 a un travail qui n’a ni sens ni qualité. 71 % d’entre eux n’ont quasiment jamais la fierté de bien travailler et 75 % n’ont jamais ou rarement la sensation d’un travail utile. En même temps, ils subissent un travail sous pression et une charge de travail excessive.
Cette catégorie regroupe des cadres et des employés administratifs de bancassurance, des personnels d’études et de recherche, des personnels de maintenance, des ingénieurs informatiques, des agents de la fonction publique en particulier cadres.
Ce sont un peu plus souvent des femmes, des trentenaires, souvent dans un environnement professionnel instable.

 1 sur 10 est surexposé aux conflits de valeurs. Ils estiment (98 %) ne pas pouvoir faire un travail de qualité, devoir faire des choses qu’ils désapprouvent (96 %), prendre des risques pour leur santé ou celle des usagers ou des patients. Peu sentent leur travail utile. Pourtant ils ressentent leur charge de travail comme excessive (les ¾), ressentent des pénibilités physiques. Ils se trouvent mal payés, sans soutien professionnel, vivent les difficultés du contact avec le public, les ¾ n’arrivent pas à se déconnecter de leur travail dans leur vie personnelle.
Les personnels soignants, les enseignants, les militaires, les policiers et les pompiers sont les plus concernés, suivis des employés de bancassurance et des caissiers et des salariés en CDI fragile.
Là aussi on retrouve davantage de femmes, et des actifs de 31 à 50 ans.

Les conflits de valeurs ont des conséquences sur la santé

L’enquête a ciblé deux facteurs : la perception d’un mauvais état de santé et les troubles du sommeil. Les salariés surexposés sont ceux qui déclarent le plus de problèmes de santé : 47 % d’entre eux pensent que leur état de santé est mauvais et 43 % ressentent des troubles du sommeil (contre respectivement 17 % et 18 % pour les non ou peu exposés). Se situent ensuite à un niveau quasi identique le groupe dont le travail manque de sens et de qualité (31 % et 30 %) et celui qui rencontre des conflits éthiques (29 % et 30 %). Les deux derniers groupes ont des atteintes plus limitées.

Les détériorations touchent également la santé mentale, à des niveaux différents selon les types de conflits de valeurs. Si, en moyenne, 10 % des actifs occupés souffrent d’un syndrome dépressif, les taux vont de 4 % pour les actifs peu exposés à 26 % pour ceux qui sont surexposés, avec y compris des idées suicidaires pour 13 % d’entre eux.

Ainsi, plus les salariés sont concernés par des conflits de valeurs, plus ils déclarent leur santé physique ou mentale altérée. Même si le lien de cause à effet est difficile à établir en fonction de l’état de santé personnelle de chacun (une mauvaise santé fait vivre encore plus mal ces situations), on voit bien la place que prennent encore les problèmes de santé et de mal-être au travail. Une raison pour réinsister sur la nécessité des commissions sécurité et santé au travail, de leur multiplication dans les CSE, de leurs moyens d’actions, en particulier au moment du renouvellement des CSE au bout de 4 ans. Une nécessité pour les élus d’agir dans toutes les entreprises pendant leur mandat. Ce d’autant plus après l’accord national interprofessionnel signé il y a quelques mois (9 décembre 2020), repris par la loi pour renforcer la prévention en santé au travail qui vient d’être définitivement adoptée le 23 juillet 2021 afin de les mettre en œuvre dans les entreprises.


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