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Comment le télétravail a-t-il été vécu pendant le confinement ?

mercredi 17 juin 2020

Une des particularités de la période du confinement, encouragée à se poursuivre pendant le déconfinement, est l’explosion du nombre de télétravailleurs parmi les actifs : il a plus que triplé, concernant ¼ des salariés ! Donc pour beaucoup, cette façon de travailler était nouvelle et imprévue. Des enquêtes ont voulu cerner la façon dont les travailleurs l’ont vécue.

Les principales perceptions qui ressortent

Il faut d’abord dire que les enquêtes apportent des conclusions variables, selon le moment où elles ont interrogé les répondants (début, en cours ou fin du confinement), selon leurs types de questions, le nombre et la représentativité des répondants (réponses libres pour #Montravailadistance, Jenparle !, et représentatives pour Odoxa et Malakoff Humanis).

Au-delà de ces différences, la conclusion qui s’en dégage est majoritairement positive, avec les souhaits des ¾ de pouvoir continuer à pratiquer le télétravail, de manière régulière ou ponctuelle, après la fin du confinement, avec cependant des points de difficultés et de vigilance.

 Un travail à distance imprévu

Pour beaucoup des télétravailleurs du confinement, c’était une première, imprévue. Selon #Montravailadistance, Jenparle !, 95 % des télétravailleurs se sont installés dans leur résidence principale, une bonne moitié dans un espace dédié. Mais un peu plus de 40 % sans espace dédié… Et selon les cas, le télétravailleur était seul (46 %), à deux (40 %), voire plus et toute une famille, créant des partages d’espace inhabituels.

Ainsi, la qualité de vie en télétravail a beaucoup dépendu du type de résidence et de ses dimensions, du nombre de personnes en télétravail, de l’équipement existant, ordinateur d’entreprise (75 %) ou personnel (24 %), individuel ou à partager, et de la connexion…

Les réponses sont cependant favorables : équipement adapté (51 %) ou partiellement adapté (37 %) et un vécu facile (20 %) ou assez facile (55 %) pour les répondants à #Montravailadistance, Jenparle !, une mise en place facile (75 %), des horaires adaptés (74 %) pour Malakoff Humanis.

 Un télétravail impréparé

D’après l’enquête #Montravailadistance, Jenparle !, seules 21 % des entreprises y étaient bien préparées, mais la moitié (51 %) s’y sont adaptées facilement. Seules 20 % s’y sont mises difficilement et 7 % ne s’y sont pas adaptées.

En conséquence, l’accompagnement a manqué à la mise en place du travail à distance, 54 % des répondants à l’enquête Malakoff Humanis ont manqué d’accompagnement, telles qu’une formation, une sensibilisation aux risques du télétravail, et même les 2/3 des nouveaux venus au télétravail (68 %) qui ont rencontré le plus de difficultés (43 % pas d’espace adapté, 48 % des difficultés techniques). Le manque de formation est plus fort encore dans les réponses à#Montravailadistance, Jenparle !, 83 % disent ne pas en avoir bénéficié.

Il faut dire que beaucoup d’entreprises n’avaient pas encore négocié l’implantation du télétravail dans leur entreprise et quand un accord avait été conclu, beaucoup de salariés n’en avaient pas ou peu encore connaissance, comme le révèle l’enquête #Montravailadistance, Jenparle !.

 Une relation différente avec leurs collègues et leurs managers ou collaborateurs

Comme tous les types d’emploi ne se prêtent pas au télétravail, celui-ci a été très inégalement pratiqué : peu dans les emplois industriels et ceux peu qualifiés, très nombreux parmi les CSP supérieures et tout particulièrement les cadres, et aussi parmi les agents des services publics. Les répondants à l’enquête #Montravailadistance, Jenparle !, comportaient 28 % de managers, ce qui donne des indications sur les relations managériales à distance.

Pour eux, ce sont de nouvelles façons de travailler avec leur équipe, avec pour les ¾ une confiance envers elles (76 %) et la confiance de leurs collaborateurs envers eux-mêmes, pour les 2/3 une perception positive du niveau d’initiative et de productivité et la moitié pour l’ambiance dans l’équipe. Les non managers sont un peu moins enthousiastes avec les 2/3 qui sont positifs dans la confiance envers leur manager et 62 % dans la confiance inverse, et un peu plus positifs pour l’ambiance dans l’équipe (53 %).

 Des bénéfices et des inconvénients

Les bénéfices tiennent pour tous dans le gain sur les déplacements et la pollution. Selon Odoxa, les 2/3 y ont aussi trouvé une souplesse et un meilleur équilibre vie privée-vie professionnelle et gestion du temps. Au niveau travail, nombreux (30 à 40 %) dans ces enquêtes ont apprécié l’autonomie, la responsabilité, leur meilleure possibilité de concentration (pas d’open space, pas de réunionnite), d’efficacité et de créativité.

Les inconvénients existent aussi. Vient en tête l’isolement ressenti, l’éloignement des collègues, d’autant plus que le télétravail était à temps plein : 73 % selon Odoxa, 50 % selon #Montravailadistance, Jenparle !. Malakoff Humanis et #Montravailadistance, Jenparle ! insistent aussi sur l’impact sur la charge de travail voire le temps travaillé, les difficultés à se déconnecter, la difficulté de mener le télétravail et s’occuper des enfants, créant pour certains une dégradation de la santé psychologique, voire des tensions avec l’entourage familial.

 Après le confinement, de nombreux points à réfléchir et négocier

En phase de confinement, le télétravail s’est improvisé et a permis aux entreprises et administrations d’éviter l’arrêt total. Les salariés s’y sont mis, ¼ d’entre eux ont continué ainsi leur travail. Mais cette expérience imprévue montre les nombreux points à traiter pour passer du travail à distance improvisé à un télétravail organisé. Citons-en quelques-uns, sans prétendre à l’exhaustivité.

  • Le télétravail doit être volontaire.
  • Si tous les emplois ne permettent pas de télétravailler, il faut traiter le problème de l’inégalité d’accès au télétravail entre catégories sociprofessionnelles.
  • Le télétravail suppose de bonnes conditions d’équipement et de travail pour le télétravailleur et la responsabilisation de l’entreprise sur les frais engendrés (matériel, connexion…).
  • Le télétravail partiel, régulier ou ponctuel, est dans la plupart des cas préférable au télétravail à 100 %, afin d’éviter les problèmes d’isolement, de perte du lien social, voire d’appartenance à l’entreprise ou administration et faire exister le collectif de travail.
  • L’accompagnement et la formation sont indispensables, formation tant technique qu’aux risques du télétravail et à la différenciation des temps. L’évaluation de la charge de travail et la mise en œuvre du droit de déconnexion sont aussi nécessaires.
  • Cet apprentissage est aussi nécessaire pour l’évolution des modes de mangement : qu’est-ce que manager à distance, avec confiance dans les télétravailleurs, en donnant des informations claires sur les objectifs comme sur les difficultés prévisibles, en développant l’autonomie, la responsabilité, en permettant l’expression à distance, en se situant comme conseil et optimisateur de compétences. Tout un changement !

On voit ainsi que, puisque les ¾ des salariés qui ont « goûté » au télétravail souhaitent y revenir, et que la période de covid a amené beaucoup d’entreprises à dépasser leur blocage antérieur contre cette forme de travail, beaucoup de points sont à réfléchir, à élaborer et à négocier pour permettre un véritable développement du télétravail, dans de bonnes conditions pour les salariés, permettant une efficacité pour les entreprises et un mieux pour l’environnement.

Les partenaires sociaux ont d’ailleurs commencé le 5 juin une série de réunions paritaires (jusqu’à la rentrée) pour établir une « diagnostic partagé » sur la question du télétravail. Le Medef souhaite s’en arrêter à donner ainsi des repères aux entreprises et aux branches. Pour les organisations syndicales, maintenant que le télétravail se développe largement, il faut que ce diagnostic soit suivi d’une mise à jour de l’ANI de 2005 par une négociation .


Sources