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Violences faites aux femmes, un bilan et des craintes

mercredi 20 janvier 2021

La journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes, le 25 novembre, a permis de dresser un premier bilan encourageant des mesures du Grenelle contre les violences décidées il y a près d’un an. Que ce soit en termes de justice (mise en place des bracelets, des téléphones « grave danger », des ordonnances de protection…) comme les dispositifs d’alerte, les places d’hébergements supplémentaires, les conventions départementales ou la collaboration avec les forces de l’ordre…, les chiffres montrent une évolution et une prise de conscience renforcées. Mais, dans le même temps, le confinement et la crise sociale jouent comme un amplificateur des rôles sociaux des hommes et des femmes. L’enfermement a exacerbé les violences intrafamiliales à l’égard des femmes comme des enfants. Le gouvernement, les associations, les syndicats alertent et agissent.

Un tableau sombre qui incite à l’action

125 840 femmes ont été victimes de violences conjugales en 2019. Et aujourd’hui, une femme décède tous les 2 jours, victime de son conjoint ou de son ex-conjoint. Depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, la lutte contre les violences faites aux femmes est une grande cause nationale. Le 3 septembre 2019 était lancé le Grenelle des violences familiales. 46 mesures étaient décidées : 28 sont effectives, soit 61 % et 18 sont en cours de réalisation, soit 39 %. Les dix mesures d’urgence annoncées par le Premier ministre le 3 septembre 2019 ont toutes été mises en œuvre. Pour la réalisation des mesures, voir en annexe du document (lien en bas du texte), page 40.

Quelques mesures emblématiques

  • 1 000 places d’hébergement supplémentaires ont été mises en place en 2020. Elles permettent aux femmes de quitter le domicile conjugal pour fuir leurs agresseurs. Et fin 2021, ce seront au total 7 700 places d’hébergement qui seront dédiées aux femmes victimes.
  • 53 conventions départementales ont été signées. Elles permettent la prise de plaintes pour violences conjugales au sein des établissements hospitaliers. Car peu de femmes portent plainte. Elles n’ont été que 18 % sur les 213 000 femmes victimes en 2018. Dans ce contexte, parce que les médecins constituent les premiers professionnels vers qui se tournent les victimes, il était important de coordonner les travaux entre les forces de l’ordre et les directions des hôpitaux et des cliniques.
  • Mise en place de différents dispositifs d’alerte. Le 39 19 est le numéro national de référence d’écoute téléphonique et d’orientation à destination des femmes victimes de violences, de leur entourage et des professionnels concernés. Le 114 est un numéro d’urgence gratuit et disponible 24h/24 7j/7 au service des personnes ayant des difficultés à parler ou à entendre. L’alerte peut se faire par SMS ou tchat. Et enfin, le portail de signalement : Arrêtons les violences. Il est gratuit, anonyme et disponible 24h/24 et 7j/7. Il assure un accueil personnalisé et adapté par un policier ou un gendarme à toute personne victime ou témoin de violences sexistes et sexuelles. Ce portail est accessible via Internet depuis un ordinateur, une tablette ou un smartphone.
  • Ouverture de 17 centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales en 2020 pour prévenir la récidive et amener la fin du cycle des violences.
  • 67 intervenants sociaux supplémentaires ont été nommés dans les gendarmeries et commissariats. Ils sont formés à l’accueil et à la prise en charge des femmes. Les 67 s’ajoutent aux 282 postes déjà existants.
  • Arrêt de bus à la demande. Il est mis en place via le décret du 19 octobre 2020. Il consiste à offrir la possibilité à toute personne voyageant seule et qui en fait la demande auprès du conducteur de descendre entre deux arrêts de bus afin d’être rapprochée de sa destination, en soirée et la nuit. Nantes (TAN) a été le premier réseau de transport à expérimenter ce dispositif avant de le pérenniser. D’autres expérimentations sont actuellement en cours : 13 réseaux de transport en province (Amiens, Bordeaux, Brest, Grenoble, Lille, Lyon, Le Mans, Orléans, Pau, Poitiers, Quimper, Strasbourg, Rouen) et une soixantaine de lignes en Île-de-France.

Les mesures judiciaires visent à protéger les victimes de violences conjugales des menaces de leur ancien conjoint après la séparation

  • Le bracelet anti-rapprochement a été mis en place en septembre 2020 puis déployé sur l’ensemble du territoire. Il s’agit du démarrage d’une opération qui visera à terme tous les tribunaux.
  • Les ordonnances de protection sont de plus en plus demandées par les victimes. Elles sont passées de 2 975 en 2018 à 5 983 en 2020. Les juges en délivrent plus : 5 % supplémentaires sur la même période. Cette ordonnance doit être rendue dans les 6 jours. Elle protège la victime même si l’auteur n’est pas encore jugé.
  • Les téléphones « grave danger », 1 201 appareils d’alerte ont été attribués à des personnes courant un grave danger. Pour la Chancellerie, 619 agressions ont été évitées en 2019 grâce à ce dispositif.

Mais des alertes lors du confinement

Les appels reçus par le 39 19 ont triplé pendant la période de confinement de mars à juin 2020. Car le confinement a enfermé les victimes dans un huis clos avec leurs agresseurs et s’est révélé propice à une recrudescence des violences intrafamiliales. Cette situation a été très vite signalée par les associations d’aide aux femmes et les organisations syndicales. Elle a amené le gouvernement à prendre des mesures inédites durant la crise sanitaire.

  • Un soutien supplémentaire aux associations d’information et d’accompagnement des femmes. L’État a débloqué 3 millions d’euros supplémentaires pour soutenir les associations durant cette période. Un financement supplémentaire de nuitées d’hébergement pour protéger les victimes de violences est acté.
  • Un dispositif « alerte pharmacie » a été mis en place. L’important maillage des établissements ouverts durant le confinement ainsi que la formation des professionnels sont des atouts. Les victimes de violences intrafamiliales peuvent se signaler auprès de leur pharmacien qui, le cas échéant, contactera les forces de l’ordre. Pérennisé à l’issue du premier confinement, ce dispositif est activé auprès des 22 000 officines en France métropolitaine ainsi qu’en outre-mer.
  • Des points d’accueil ont été mis en place dans les supermarchés et les centres commerciaux après un accord avec les professionnels de la grande distribution. Ils permettent de créer des points de contact hors du domicile et de toucher des victimes qui n’effectueraient pas la démarche de se rendre vers un dispositif « classique ». Ainsi la Dépêche du Midi dans son édition du 24 novembre 2020 signale que tous les 15 jours, le grand centre commercial de Portet-sur-Garonne (31) accueille un stand d’information tenu par deux gendarmes et un membre d’association.

Si les associations soulignent d’importantes avancées, elles regrettent que certaines des mesures soient restées sans réponse pour l’instant, ainsi qu’un manque de moyens. Mais il faut signaler qu’à la date du 23 novembre 2020, on compte 70 féminicides en France depuis le début de l’année, contre 146 l’année dernière. Signe que lorsque d’importants moyens sont déployés, la lutte contre les violences conjugales avance.

Simone de Beauvoir avait écrit :

« Il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question ».

Soyons tous vigilants !


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