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Quand les jeunes quittent-ils le nid familial ?

samedi 26 février 2022

Le CEREQ examine à la loupe 3 générations pour déterminer à quel moment les jeunes rentrent dans la vie active avec tout ce qui va avec : un emploi, un salaire, un logement, parfois un couple. Quel est la prise d’indépendance des générations 1998, 2004 et 2010 ? Une manière de mettre en lumière les comportements privés mais aussi le rôle des politiques publiques dans cette étape essentielle de la vie.

Les enquêtes Génération du CEREQ

Les enquêtes Génération du Céreq sont une mine pour tous les observateurs des questions sociales. Dans cette enquête, les chercheurs ont analysé les calendriers mensuels des cinq premières années de vie active pour étudier les processus d’entrée en emploi et de décohabitation. Pour les jeunes sortis pour la première fois du système éducatif successivement en 1998, en 2004 et en 2010, l’observation montre que cinq ans après la fin de leurs études, ils sont respectivement 70 %, 67 % et 66 % à habiter hors du foyer parental. Une baisse légère au fil des années.

Prendre son indépendance, une décision avec plusieurs facteurs

Pour le CEREQ, la capacité des jeunes à prendre leur indépendance varie en fonction de plusieurs facteurs. La durée des études, le niveau du diplôme, l’accès plus ou moins rapide à l’emploi, le type de contrat de travail et la rémunération obtenus en début de vie active, le genre mais aussi le contexte économique et familial ou l’état du marché du logement. On le voit, c’est une équation à multiples entrées qu’ont examinée les chercheurs en s’intéressant aussi au retour possible chez les parents, aux permanences et aux différences entre les générations.

Premier enseignement, pour les trois générations, les plus diplômés et les femmes décohabitent davantage

  • Les jeunes les plus diplômés accèdent plus vite à l’autonomie résidentielle et sont peu nombreux à demeurer chez leurs parents tout au long des cinq années qui suivent la fin de leurs études (3 % des diplômés de niveau bac +5 ou plus).
  • Une des explications pour les plus diplômés est qu’ils sont avant tout plus âgés. Ils font aussi partie de ceux qui quittent très souvent le domicile parental avant même la fin des études, autour de 70 % pour les trois générations.
  • Les femmes sont également plus nombreuses que les hommes à décohabiter pendant leurs études et quittent plus souvent le foyer familial à la faveur d’une mise en couple, elle-même plus précoce que pour les hommes. Les décohabitations vers un habitat en couple représentent pour chaque année et chaque génération 60 % des décohabitations féminines entre la première et la cinquième année après la fin des études, contre 35 % à 50 % chez les hommes.

Deuxième enseignement, l’accès au CDI et la rémunération sont 2 facteurs clés de l’autonomie

  • La rémunération pour un même statut joue un rôle déterminant, plus son niveau est élevé, plus le jeune a des chances de quitter le domicile parental.
  • L’emploi et le chômage n’induisent pas les mêmes situations. 28 % des jeunes en emploi habitent toujours chez leurs parents 5 ans après la fin des études alors que cette proportion s’élève à 48 % pour les jeunes au chômage.
  • Un jeune a plus de chance de décohabiter une année donnée s’il a passé la majeure partie de celle-ci en emploi à durée indéterminée plutôt qu’en emploi à durée déterminée.
  • En revanche, pour la dernière année 2010, un cumul de CDD semble moins insécurisant qu’auparavant et l’obtention d’un CDI une condition de moins en moins nécessaire pour s’installer chez soi.
  • Les chercheurs notent que le départ du domicile parental est aussi facilité par le développement des colocations (un phénomène nouveau) et reste tributaire des politiques du logement et des aides spécifiques en direction des jeunes comme, en 2010, la mise en place du RSA « jeune actif ».

Enfin, la place de la conjoncture économique reste forte

On voit à travers plusieurs paramètres que la prise d’autonomie est sensible à la conjoncture économique. Pour le CEREQ, il est notable que les conditions d’insertion entre 1998 et 2010 se sont dégradées. Les jeunes de ces générations sont davantage restés chez leurs parents pendant la totalité des 5 premières années de vie active, 29 %, alors que pour la génération 1998 ce chiffre n’est que de 25 %. Les résultats montrent que cette situation est encore plus forte pour les non-diplômés.

De même entre 1998 et 2010, les jeunes ayant quitté le domicile familial ont 1,4 fois plus de chances de retourner chez leurs parents que les jeunes de 1998. Au total, 10 % des jeunes des 3 générations réintègrent le foyer parental après un premier départ.

Enfin en conclusion, le CEREQ note que « l’accès à l’autonomie résidentielle reste marqué par de fortes inégalités, dans le cadre de politiques du logement qui demeurent familialistes, là où les pays scandinaves privilégient une logique universaliste d’allocations non conditionnelles ». Le centre pose une question d’actualité : le « contrat engagement jeune » qui doit voir le jour en mars 2022 contribuera-t-il dans ce sens à rapprocher la France du modèle nordique ?


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