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Photographie d’un troisième plan rectificatif des finances pour 2020

samedi 4 juillet 2020

La situation économique – et sanitaire - est si incertaine que nous avons maintenant un 3ème projet de loi de finances rectificative après celui (1) du 23 mars puis (le 2) du 25 avril : celui de juin le N°3 (Conseil des ministres du 11 juin) est actuellement en cours de discussion au Parlement.

Photographie de la situation début juillet 2020 : où en est-on aujourd’hui, quelles sont les principales caractéristiques du PLFR N° 3 et quels sont les principaux débats en cours.

1 – Les caractéristiques essentielles du PLFR N°3

Un nouveau projet de loi de finances était nécessaire pour tenir compte des prévisions de croissance révisées, (très) défavorables dorénavant prévues à -11 % pour 2020 (cette prévision du gouvernement est en ligne avec les récentes prévisions du 10 juin de l’OCDE). Ceci est la conséquence de la baisse prolongée de l’activité économique.

Par ailleurs le PLFR intègre la plupart (pas tous) des dispositifs d’urgence en faveur des salariés et des entreprises :

  • le soutien à l’activité partielle pour 31 milliards ;
  • le fonds de solidarité pour les « très petites entreprises » pour 8 milliards ;

Ainsi qu’une « mobilisation de ressources de 43,5 milliards » dont :

  • le plan tourisme pour 18 milliards ;
  • le plan de soutien au secteur automobile pour 8 milliards ;
  • le plan de soutien au secteur aéronautique pour 15 milliards ;
  • le plan de soutien en faveur du secteur des startups et entreprises technologiques de 1,2 milliard ;
  • le plan de soutien en faveur du secteur culturel pour un total de 1,3 milliard ;
  • une exonération de cotisations et contributions sociales patronales associée à un crédit de cotisation pour près de 3 milliards qui s’adresse aux TPE et PME des secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, de la culture, de l’évènementiel, du sport, du transport aérien ;
  • un accompagnement des collectivités territoriales face à la crise, avec une enveloppe de près de 4,5 milliards [dont un « milliard supplémentaire des crédits de l’État dédiés au soutien des investissements des collectivités territoriales qui contribuent à la résilience sanitaire, à la transition écologique ou à la rénovation du patrimoine bâti et non bâti »] ;
  • « pour les plus fragiles un renforcement des moyens dédiés à l’hébergement d’urgence, à la lutte contre les violences faites aux femmes, au financement des aides exceptionnelles aux étudiants, aux jeunes précaires ».

2 - Les aléas de la prévision en ce moment

Comme le note le gouvernement dans ce PLFR 3 les prévisions prises en compte comportent des aléas importants comme l’évolution de la pandémie, le dynamisme incertain de la consommation, le comportement des entreprises à ces aléas ; on peut ajouter les aléas de la situation internationale et parfois européenne.

3 -Les manques du PLFR

Le Haut Conseil des Finances Publiques note, à juste titre, dans son avis du 8 juin que :

  • le gouvernement n’a pas présenté de projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale « malgré le surcroit prévu des dépenses de santé » ;
  • « toutes les mesures de soutien de l’activité annoncées par le gouvernement, notamment certains plans sectoriels, n’ont pas été traduites dans ce PLFR ».

4 - Les débats en cours : cinq (à ce stade) peuvent être sélectionnés

  • Endettement. Les débats, à ce sujet, entre économistes (et politiques) sont animés : il y a les partisans de l’annulation de tout ou partie de la dette (en particulier de celle contractée par la BCE) et même ceux qui considèrent que ce sujet ne se pose pas vraiment : exemple à l’appui du Japon (dont la dette de l’État s’élève à 250 % du PIB).
  • Chômage et temps partiel : c’est l’indicateur humain le plus percutant en effet – avant la pandémie - le taux de chômage était de 8,1 % à fin décembre 2019 mais en avril 2020 le nombre de chômeurs de catégorie A inscrits à Pôle emploi (hors Mayotte) a bondi de 22,6 % avec une hausse de 843 000 demandeurs d’emploi par rapport au mois de mars. Comme d’habitude ce sont les jeunes et les intérimaires qui sont les plus fragilisés.

Dans la période de crise sanitaire aigüe, des dispositifs de chômage partiel ont été mis en place mais ceux-ci sont estimés maintenant trop coûteux par les pouvoirs publics (31 milliards) et ils amorcent une diminution progressive du dispositif initial, laquelle est défavorable aux salariés et aux entreprises, ce alors que la reprise de l’activité économique est toujours très incertaine.

  • Europe : la question européenne, dans sa dimension économique, a trop longtemps tourné autour de la mise en œuvre de règles et de normes : cette approche a montré ses limites. La prise en compte des conséquences de la pandémie a maintenant conduit les principaux acteurs, BCE - couple franco-allemand - Commission Européenne, à prendre des initiatives d’ampleur.

La question est maintenant de savoir si la capacité d’emprunt envisagée – par le couple franco-allemand comme par la Commission Européenne - va pouvoir aller à son terme sans être entravée par les « frugaux » (Suède – Pays-Bas – Danemark – Autriche ou /et par les pays du « groupe de Visegrad » (Hongrie – Pologne - République Tchèque – Slovaquie).

La réponse à cette question sera fournie à l’issue des Conseils européens de juin et juillet. L’enjeu est important pour l’avenir de l’Union, particulièrement dans le cadre d’une compétition acharnée entre les États-Unis et la Chine.

  • Transparence : le débat public mériterait une information claire et transparente sur les enjeux et moyens mis en œuvre. L’affaire des masques conduit, à cet égard, à être particulièrement vigilant. D’une certaine manière la transparence n’est pas non plus à l’œuvre s’agissant des plans sectoriels pas plus que sur les sommes mobilisées globalement de 460 milliards (Bruno Le Maire), près de 500 milliards (Emmanuel Macron) : on additionne là des « choux et des carottes » puisque aucune distinction n’est faite entre les transferts de crédits, les crédits de trésorerie, les crédits garantis…
  • Reprise et relance : les deux termes ne sont pas identiques. La reprise se situe dans le court terme, la relance dans le moyen et long terme. Le gouvernement a annoncé un plan de relance pour l’automne : il est indispensable. Dans tous les cas – reprise et relance - il conviendrait de vérifier en premier lieu dans les plans sectoriels la nature des investissements et leur compatibilité avec les objectifs de développement durable et de transition écologique.

Dans sa présentation le gouvernement note que : « la révision des perspectives de croissance et l’impact des mesures budgétaires conduisent à revoir le déficit public à 11,4 % (contre 9,1 % dans le PLFR 2). Le plan de mars prévoyait un plan de soutien à hauteur de 45 milliards, celui d’avril de 45 à 110 milliards. Ce projet de loi de finances rectificative traduit ainsi les conséquences sur le budget de l’État des plans annoncés à hauteur de près de 40 milliards pour les secteurs les plus touchés par la crise : tourisme, secteurs automobile et aéronautique, culture et presse, soutien aux entreprises de technologie.