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Discriminations des salariés atteints de maladies chroniques

mercredi 24 janvier 2024

La 16ème édition du baromètre, enquête réalisée chaque année par le Défenseur des droits en partenariat avec l’Organisation internationale du travail (OIT), dresse un panorama dans l’emploi, privé et public, en interrogeant un échantillon représentatif de la population active. Celui-ci concerne d’abord l’état de santé et plus précisément les discriminations dans l’emploi des personnes atteintes de maladies chroniques.

Constats : une personne active sur dix déclare avoir été témoin de discrimination ou de harcèlement discriminatoire lié à l’état de santé et /ou au handicap au cours de son parcours professionnel. Une personne sur six atteintes de maladie chronique y a été confrontée.

Les personnes ayant une maladie visible ont trois fois plus de risques d’avoir été confrontées à une discrimination ou un harcèlement discriminatoire en raison de l’état de santé ou du handicap que celles avec une maladie invisible. Celles qui connaissent des limitations dans leurs activités habituelles du fait de leur maladie ont quatre fois plus de risques d’être discriminées que celles qui n’en ont pas.

  • Plus de quatre personnes actives atteintes de maladies chroniques sur dix y sont confrontées, tous critères confondus, dans le cadre de leur recherche d’emploi ou de leur carrière, contre un cinquième du reste de la population, soit une fréquence deux fois plus importante.
  • 55 % des personnes malades déclarent avoir vécu une situation de harcèlement moral dans l’emploi, contre 35 % pour le reste de la population active.
  • 30 % des personnes malades ou reconnues handicapées rapportent avoir été confrontées, lors d’entretiens de recrutement, à des propos stigmatisants, contre 13 % de la population active.

Les conditions d’emploi, comme le fait d’être à temps partiel et de se sentir souvent isolé au travail, la catégorie socio-professionnelle ainsi que la pénibilité du métier sont corrélées au fait d’être exposé à une discrimination en raison de l’état de santé et du handicap. Les salariés malades sont souvent contraints de travailler à temps partiel pour concilier maladie, traitements et travail. Les possibilités sont plus réduites et les discriminations à l’embauche fréquentes.

  • Par rapport au reste de la population active, les personnes atteintes d’une maladie chronique victimes de discrimination dans l’emploi se tournent plus que les autres vers la médecine du travail (17 % contre 8 %), le référent handicap et l’inspection du travail (9 % contre respectivement 3% et 4 %)
  • Seulement la moitié ont informé leur employeur ou supérieur hiérarchique de leur état de santé et, parmi ceux qui ne l’ont pas fait, 40 % déclarent craindre les répercussions négatives (sanctions, mesures de représailles, perte de confiance, crainte d’une redistribution des tâches sur d’autres collègues).

Lors d’une candidature de poste, plus de la moitié des malades ne parlent jamais de leur problème de santé.

  • Lors de la recherche d’un emploi, 59 % des personnes atteintes de maladie chronique se sont censurées en ne répondant pas à une offre d’emploi qui correspondait pourtant à leurs compétences, contre 34 % pour le reste de la population active.
  • Parmi les personnes déclarant leurs problèmes de santé, la moitié rapportent des répercussions négatives (licenciement, non-renouvellement du contrat ou mesures de représailles, dégradations des conditions de travail, changement d’attitude de l’entourage professionnel, blocages dans les mesures d’avancement, difficulté à trouver un emploi stable).
  • Un tiers des personnes atteintes d’une maladie chronique doutent ou ne pensent pas que leur état de santé leur permettra d’exercer le même poste d’ici deux ans, contre 16 % du reste de la population active.

Un tiers des salariés malades ayant eu un arrêt de plus de 60 jours au cours des 5 dernières années n’ont pas bénéficié de visite médicale obligatoire de reprise du travail. 78 % des salariés malades approuvent les recommandations formulées par le médecin lors des visites de pré-reprise et de reprise qui ont suivi un arrêt de travail de plus de 60 jours.

  • Mais dans près d’un tiers des cas, l’employeur n’a pas suivi les préconisations de la médecine du travail pour des salariés atteints d’une maladie chronique comme le maintien dans l’emploi, les obligations de l’employeur et le collectif de travail.
  • 19 % des salariés atteints d’une maladie chronique bénéficient d’un aménagement de leur poste et 29 % n’en bénéficient pas et plus d’un quart déclarent que l’employeur a refusé de le mettre en place.
  • 40 % des personnes reconnues malades ne bénéficient pas du soutien ni de la compréhension de leur employeur.
  • 15 % des actifs rapportent qu’ils se sentiraient mal à l’aise si l’un ou l’une de leurs collègues avait un cancer et 14 % s’il ou elle était porteuse ou porteur du VIH.

En France, depuis la loi N° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, la maladie chronique est expressément reconnue comme handicap.

  • La Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH) a été ratifiée par la France en 2010.
  • La Cour de justice européenne reconnait comme handicap toute maladie curable ou incurable qui entraîne une limitation à la vie professionnelle par rapport aux autres travailleurs.
  • Seule une minorité de personnes font les démarches pour obtenir une reconnaissance administrative de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).
  • 2,7 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans en bénéficient, soit un quart des personnes déclarant avoir un handicap ou une maladie chronique.
  • Pour remédier à cette situation, la loi pour le plein emploi prévoit que tous les bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pourront bénéficier des droits attachés à la RQTH, ce qui devrait simplifier les procédures et réduire les non-recours.

La défenseuse des droits alerte sur la nécessité de renforcer les moyens de la prévention de la santé et de la lutte contre les discriminations. Elle invite l’ensemble des parties prenantes à réfléchir aux modalités possibles pour favoriser le maintien dans l’emploi des personnes atteintes de maladie chronique et nécessaires à une meilleure prise en charge en matière de lutte contre les discriminations fondées sur l’état de santé ou le handicap.


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