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Aides alimentaires dans les grandes villes

mercredi 23 février 2022

Au printemps 2021, une majorité de centres de distribution d’aide alimentaire déclarent une augmentation de leur fréquentation (forte dans 21 % des cas et modérée dans 36 % des cas). Les centres les plus grands signalent de fortes hausses de bénéficiaires par rapport à l’avant-crise sanitaire. Des disparités territoriales apparaissent. Les centres implantés dans des grandes villes sont plus affectés que ceux des villes plus petites. Les villes exposées à la pauvreté et au chômage sont plus impactées. La France est pourtant un des pays européens avec un faible taux de pauvreté monétaire mais qu’en est-il du taux de privation matérielle et sociale ?

Taux de pauvreté monétaire et taux de privation matérielle et sociale dans les pays de l’Union Européenne en 2018 (%) : les enquêtes Eurostat montrent que la France est mieux placée en termes de pauvreté monétaire (13,6 % pour la France et 16,4 pour la zone euro) qu’en termes de privation matérielle. La France a moins de pauvres mais les pauvres vivent plus mal leurs situations malgré le système de protection sociale qui atténue très fortement les inégalités primaires :

  • Les privations matérielles sont corrélées à la richesse du pays. Le niveau médian des Pays-Bas, de l’Autriche, de l’Allemagne est plus élevé que celui de la France.
  • Réduire les inégalités monétaires n’atténue pas forcément la pauvreté ressentie.
  • Accroitre le revenu de l’ensemble de la population contribue à réduire le sentiment de pauvreté.
  • Les enquêtes sur « Quelle part des Français ne mangent pas à leur faim ? » : on demande aux personnes interrogées « si elles peuvent se payer un repas contenant de la viande, du poulet, du poisson… ». Pour la France la réponse est de 7 à 8 % d’incapacité alimentaire.

L’enquête du Secours catholique pour l’année 2020 signale un revenu de vie des personnes interrogées en baisse. Il est de 537 euros (soit une baisse de 6 euros par rapport à 2019) :

  • 7 millions de personnes ont eu recours à l’aide alimentaire, soit 10 % de la population. Les majoritaires : les jeunes actifs, les jeunes parents surtout s’ils sont célibataires, les étrangers au statut légal précaire représentent 50 % des personnes rencontrées.
  • 27 % des ménages rencontrés ne mangent pas pendant une journée entière voire davantage et de manière régulière.
  • 22 % des personnes rencontrées n’avaient aucune ressource financière. Un tiers des personnes rencontrées qui sont éligibles au RSA n’y ont pas recours, le taux de non-recours aux allocations familiales est de 26 %.
  • 56 % des personnes rencontrées étaient issues d’un logement précaire.
  • La demande alimentaire a augmenté de 54 % en un an.

Enquête alimentaire réalisée en mai 2021 par l’INSEE et la DREES auprès des sites de distribution d’aide alimentaire (3 052 réponses dont 1 589 exploitables), fruit d’une collaboration avec l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS) et plusieurs réseaux associatifs : l’Association nationale des épiceries solidaires (Andes), la Croix-Rouge française, les Restos du cœur et la Fédération française des banques alimentaires (FFBA), les sites de distribution indépendants des principaux réseaux nationaux… Cette enquête ne permet pas de recenser les aides alimentaires informelles (famille, amis, voisins…) :

  • Une hausse d’activité dans la majorité des centres de distribution.
  • Les deux tiers (65 %) signalent un accroissement de la part des nouveaux bénéficiaires parmi l’ensemble des personnes aidées et 18 % (1 sur 5) estiment que cet accroissement est fort.
  • Les grands centres s’appuient sur un plus grand nombre de bénévoles, ce qui a facilité leur approvisionnement dans un contexte d’approvisionnement tendu.
  • À caractéristiques égales, les centres accueillant plus de 150 personnes par semaine ont une probabilité deux fois plus élevée de déclarer une hausse de leur fréquentation et l’arrivée de nouveaux publics.

Trois régions sont plus affectées que d’autres, l’île de France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et l’Outre-mer :

  • Une forte augmentation de personnes accueillies : 37 % des centres de Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), soit +16 % par rapport à la moyenne nationale, 35 % en île de France (+14 points que la moyenne), 31 % en Outre-mer (+10 points que la moyenne).
  • Une forte augmentation de nouveaux publics liés à la crise sanitaire : +33 % pour les sites d’Outre-mer, +25 % en Paca, et +17 % en Île-de-France contre +14 % parmi l’ensemble des centres.
  • Une forte augmentation des denrées distribuées : +35 % en Ile de France, +31 % en Outre-mer, et +26 % en Paca, contre +19 % dans l’ensemble des centres.

Au sein des régions relativement préservées, les centres situés dans les unités urbaines les plus petites (moins de 5 000 habitants), déclarent en majorité (71 %) que le nombre de personnes recevant l’aide alimentaire est restée stable et a même diminué. Les évolutions des publics semblent corrélées au taux de pauvreté de la commune avant la crise sanitaire :

  • 28 % des communes denses avec un taux élevé de pauvreté avant la crise déclarent que le nombre de personnes aidées a fortement augmenté. 23 % de ces communes estiment que la part des publics rencontrés en raison de la crise sanitaire représentent plus de 30 % de l’ensemble (contre 23 % et 12 % des communes denses où le taux de pauvreté était moyen ou faible avant la crise).
  • À caractéristiques comparables, les centres situés dans des communes conjuguant une forte densité et un taux de pauvreté élevé estiment 2,6 fois plus souvent que la part des publics arrivés en raison de la crise sanitaire est supérieure à 30 % de leurs bénéficiaires, par rapport aux centres implantés dans des communes denses et où le taux de pauvreté est moyen ou faible.
  • Les sites dans les communes denses avec un taux élevé de pauvreté sont susceptibles de signaler une forte hausse des parts des femmes, des étudiants et des personnes non francophones au début de 2021 par rapport à l’avant-crise.
  • En dehors des communes denses, l’influence du taux de pauvreté sur l’évolution de l’activité des centres de distribution apparaît moins nette.

L’évolution des différents publics épouse la composition sociale des territoires : les centres situés dans des communes où les 18-24 ans représentent une part importante de la population observent une importante hausse des parts des jeunes (17 % contre 13 %) et des étudiants (18 % contre 10 %). Ces mêmes centres estiment à plus de 30 % la part des publics arrivés avec la crise sanitaire. Dans les épiceries solidaires, ce sont des hausses modérées.

Les centres proposant d’autres types d’aide en plus de l’aide alimentaire, comme des vêtements, des produits d’hygiène ou de l’aide pour les démarches administratives, l’accès aux droits, à la recherche d’emploi, des aides financières comme les chèques services, chèques énergie, loyer… ou de l’aide à l’hébergement, de l’aide aux soins médicaux, cours de français, d’informatique, soutien psychologique, activités de répit familial … ont plus souvent constaté une hausse importante du nombre de bénéficiaires et de nouveaux bénéficiaires.


Références