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Prévenir le décrochage scolaire : une nécessité absolue et des réponses adaptées

mercredi 23 octobre 2019

Nous ne sommes plus à l’époque où l’on laissait les jeunes et les familles seuls face à une sortie du système scolaire en milieu d’année ou sans diplôme. La prévention du décrochage scolaire s’impose désormais dans le système éducatif et auprès de tous les acteurs institutionnels et c’est tant mieux. Tout n’est pas gagné pour autant et la particularité du décrochage dans l’enseignement professionnel nécessite des analyses et des réponses adaptées dans les CFA comme dans les lycées professionnels. C’est tout l’intérêt de cette enquête du Cereq dans des établissements de la métropole marseillaise.

L’enseignement professionnel est déjà pour certains une filière de « raccrochage »

En effet, les phénomènes d’orientation font de l’enseignement professionnel une filière de « raccrochage » pour certains jeunes mal à l’aise dans l’enseignement général. Nous savons aussi que la majorité des décrocheurs sont issus des lycées professionnels (LP) et des centres de formation d’apprentis (CFA). Il est donc particulièrement important de garder les jeunes présents dans cet enseignement avec une dynamique positive vers la conclusion de leurs études et l’obtention de leurs diplômes. L’enquête du Cereq montre que les CFA et les lycées professionnels, s’ils ont des similitudes, n’ont cependant pas affaire aux mêmes types de ruptures de parcours. Bien les identifier permet de mieux les traiter.

Deux conceptions du décrochage

L’expression « décrochage scolaire » tend à s’imposer en France depuis la fin des années 2000 pour désigner les sorties prématurées du système éducatif dans le secondaire et, par extension, dans l’enseignement supérieur. Au-delà, les deux types d’établissements étudiés, les CFA et les lycées professionnels, offrent des parcours de formation différents, qui n’impliquent pas les mêmes formes de décrochage.

La situation dans les CFA

En CFA, la question du décrochage apparaît avec les résiliations de contrats d’apprentissage, qui entraînent l’arrêt du parcours de formation. Il est vrai que l’apprentissage repose sur un régime de responsabilité fondé sur une logique contractuelle et que l’apprenti est placé dans un rapport de subordination vis-à-vis de son employeur. Les actions de prévention privilégient de ce fait l’amélioration des relations du CFA avec les entreprises.

  • Les causes de résiliation

Pour le CEREQ, elles sont bien sûr d’abord liées à la qualité des relations entre apprentis et employeurs. Mais aussi au décalage qui peut exister entre les conditions réelles du travail en entreprise et les représentations que s’en faisait le jeune. Ce décalage entraine des ruptures précoces, souvent en période d’essai. Cette situation est aggravée dans les secteurs d’activité marqués par un déficit d’attractivité et de mauvaises conditions d’emploi.

  • Quand l’emploi joue contre le diplôme !

L’enquête s’est intéressée aussi aux apprentis qui n’obtiennent pas le diplôme préparé et les enquêteurs ont constaté que pour certaines spécialités le travail peut concurrencer la formation. En effet, certains employeurs ne résistent pas à embaucher à temps plein un apprenti qu’ils souhaitent fidéliser. C’est une situation minoritaire.

  • La politique de prévention des CFA

Dans les CFA, l’encadrement institutionnel de la prévention relève du Conseil régional. La priorité est donnée à la prévention des résiliations « sans suite » et les « développeurs » – en charge du démarchage des employeurs en vue de conclure des contrats d’apprentissage – sont en première ligne. Leur action préventive permet de repérer les entreprises susceptibles de concentrer davantage de ruptures contractuelles afin d’éviter d’y envoyer les jeunes.

L’action préventive peut être facilitée par l’inscription du CFA dans un espace sectoriel de branche avec des aides de nature financière mais aussi d’ordre relationnel qui favorise la coordination avec les employeurs et aussi l’échange d’informations sur la réalité de la filière.

Autre exemple, un des CFA interprofessionnels enquêté a élaboré une procédure de pré-inscription par internet pour renforcer l’information des candidats à l’apprentissage sur la réalité des métiers visés.

Tournons-nous vers les lycées professionnels

En lycée professionnel, le décrochage s’apparente en grande partie à l’échec scolaire et sa prévention privilégie la lutte contre l’absentéisme. Les actions de repérage et de prévention portent sur les absences, la discipline (sanctions et punitions), les ruptures de scolarité (abandons, exclusions par le conseil de discipline) et les réorientations en cours d’année. La priorité absolue reste de garder les élèves au sein des établissements. Ceux-ci mettent en œuvre des politiques larges ne s’arrêtant pas à un problème, avec des modalités de prévention qui permettent d’agir à différentes échelles (la classe, l’établissement et le bassin de formation).

Deuxième type de prévention qui s’intéresse aux situations individuelles des élèves (situation personnelle, contrôle des entrées et sorties, suivi des absences en temps réel, relations étroites avec les familles). L’objectif est alors d’éviter que des élèves se retrouvent sans solution en matière de formation ou d’emploi et que les situations de décrochage ne conduisent à des ruptures de scolarité.

Les nouvelles réformes vont-elles aider ?

Le secteur vit au rythme des réformes de l’apprentissage (loi Avenir professionnel) et de l’enseignement professionnel (loi pour une École de la confiance), et la question se pose sur l’efficacité renforcée des actions publiques. On retient que désormais la responsabilité de l’apprentissage incombe principalement aux branches professionnelles, et donc aux employeurs.
Ce changement doit entrainer, pour le Cereq, de nouvelles règles garantissant une formation en entreprise de qualité, avec « une vigoureuse prévention de certaines pratiques déviantes des entreprises, et une plus grande implication des employeurs dans le conseil d’administration et le conseil de perfectionnement des CFA ».
De plus l’organisme plaide pour que les jeunes, quels que soient leurs statuts et leurs établissements, bénéficient de services d’accompagnement répondant à des normes de qualité fondées sur un suivi individualisé. Nous pourrions y rajouter qu’une attention plus forte pourrait être portée à l’aspect pédagogique et en particulier comment rendre les cours plus attractifs.

Enfin, « la concentration en LP et en CFA des situations d’orientation par défaut, sources majeures du désengagement et de la démotivation qui conduisent au décrochage, invite à renforcer les actions en faveur de l’orientation choisie ». Nous ne pouvons que souscrire à ces conclusions et inciter les équipes syndicales dans l’entreprise et la branche à se saisir de cette nouvelle donne.
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Source
Guitton Christophe, Kornig Cathel, Verdier Eric, Prévenir le décrochage : une comparaison entre lycées professionnels et CFA, Céreq Bref, n°380, 2019, 4p.
https://www.cereq.fr/prevenir-le-decrochage-une-comparaison-entre-lycees-professionnels-et-cfa