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L’économie collaborative : la situation politique des 2 côtés de l’Atlantique (I)

samedi 19 mars 2016

Alors que le député Pascal Terrasse (PS) vient de remettre son rapport parlementaire sur l’économie collaborative et fait des propositions pour encadrer ces nouvelles formes d’activité qui donnent lieu à de nombreuses polémiques, la campagne présidentielle aux États-Unis permet aux partis politiques d’exprimer leurs positions sur cette question alors que, dans le même temps, les décisions de justice et des collectivités locales amènent des changements sociaux. Voici un regard croisé sur la situation des 2 côtés de l’Atlantique.

1. Le rapport Terrasse préconise de mieux encadrer l’économie collaborative

Pascal Terrasse, député PS de l’Ardèche, a été chargé par le gouvernement d’une mission sur l’économie collaborative, afin d’analyser les enjeux liés à l’émergence des plateformes collaboratives. Le rapport vient d’être remis au 1er Ministre. En 19 propositions, le rapport s’attache à préciser ce qu’est l’économie collaborative, à envisager des pistes pour fiabiliser l’utilisation par les consommateurs, à définir les droits et les devoirs de ces « nouveaux entrepreneurs ». L’économie collaborative doit être soumise au droit au même titre que l’économie traditionnelle. Néanmoins, son développement doit être soutenu car elle offre de nouvelles opportunités d’emplois et elle est source d’innovations.

Qu’est-ce que l’économie collaborative ?

L’économie collaborative (ou du partage) est une économie de pair à pair. (Voir Clés du social *). Elle repose sur le partage ou l’échange entre particuliers de biens, de services ou de connaissances avec échange monétaire ou sans échange monétaire et par l’intermédiaire d’une plateforme numérique de mise en relation. L’économie collaborative se développe dans tous les secteurs d’activité.

Les technologies numériques ont eu un impact déterminant dans son essor. La crise économique et financière de 2007-2008 a aussi contribué à son développement, les particuliers étant à la recherche d’économies et de revenus complémentaires. Enfin, l’économie collaborative répond à des phénomènes de sous-utilisation de biens et d’infrastructures en favorisant l’usage des biens plutôt que leur possession.

La France est bien placée

Le rapport dénombre 276 plateformes présentes sur internet, dont 70% sont françaises. En 2015, près d’un Français sur deux a déjà acheté ou vendu à un autre particulier sur internet.

Le rapport fixe 4 grands objectifs aux politiques publiques

  1. D’abord, permettre à l’économie collaborative de libérer tout son potentiel de croissance. 
  1. Ensuite, garantir le fonctionnement loyal et transparent de ces plateformes, pour les consommateurs et par souci d’équité vis-à-vis des acteurs de l’économie traditionnelle. Le projet de loi pour une République numérique, adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, pose d’ores et déjà les fondements de cet environnement concurrentiel équitable. 
  1. Troisième objectif : mieux accompagner les parcours professionnels des travailleurs de ce secteur, et améliorer leur protection sociale et la portabilité de leurs droits. La convergence des droits sociaux entre les indépendants et les salariés doit être progressivement instaurée. Les plateformes doivent aussi soutenir les démarches de formation de ceux qui travaillent avec elles et favoriser, par exemple, l’accès au logement et au crédit. Pour le député, inutile de réfléchir à un « statut » spécifique, le code du travail, le code général des impôts, le code du commerce et le code de la sécurité sociale s’appliquent.
  1. Le rapport rappelle enfin que les plateformes doivent contribuer, à leur juste mesure, à la solidarité nationale par le paiement de l’impôt. L’administration doit faire une distinction nette entre particuliers et professionnels, et clarifier les obligations de chacun. M. Terrasse veut éviter que ces grandes plateformes ne se soustraient à l’impôt en France. « L’économie collaborative n’est pas une zone de non-droit », insiste le parlementaire, qui propose « d’assurer la contribution des plateformes aux charges publiques de la France ». Le rapport préconise que les plateformes transmettent le montant des transactions dont elles ont connaissance à l’administration pour alimenter la déclaration pré-remplie de l’impôt sur le revenu. Il demande une clarification de la doctrine de l’administration sur la distinction entre un revenu occasionnel ou un partage de frais comme le covoiturage, et une véritable activité lucrative, qui exigerait que l’utilisateur s’enregistre en tant que professionnel. Le député recommande un seuil (2 000 ou 3 000 euros ?) à partir duquel l’activité serait jugée comme régulière et donc soumise à l’impôt. En un mot, trouver le juste équilibre entre réglementation et absence de règlementation.

Conclusion

Pascal Terrasse a voulu « dépassionner le débat » sur l’économie collaborative et proposer des pistes pour qu’elle se « développe au profit de l’économie dans son ensemble ». Porté par la conviction que l’économie collaborative « ne se résume pas à l’ubérisation », Pascal Terrasse rappelle qu’elle trouve son origine dans des courants de pensée alternatifs : logiciels libres, économie de la fonctionnalité (où l’usage d’un bien prévaut sur sa propriété), systèmes de don ou d’échange…

Plutôt que d’inventer de nouvelles règles, Pascal Terrasse se prononce en faveur d’un plus grand respect de celles qui existent. Selon lui, pour réduire les frictions entre économies numérique et traditionnelle, il importe de responsabiliser les plateformes, leurs utilisateurs mais aussi l’administration.

Le Gouvernement, par la voix de Manuel Valls, a indiqué s’engager dans une démarche pragmatique pour conforter les usages collaboratifs des Français tout en assurant une égalité de traitement entre acteurs. En résumé, une régulation sans surrèglementation. Le Gouvernement devrait présenter dans les prochaines semaines les actions qui seront engagées en ce sens, en mettant à profit les différents textes économiques en cours d’élaboration.


Sources
http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2016/02/08.02.2016_synthese_du_rapport_sur_leconomie_collaborative.pdf
http://www.vie-publique.fr/actualite/dossier/rub1859/economie-collaborative-nouveau-modele-socio-economique.html

(*) Retrouver sur Clés du social :
http://www.clesdusocial.com/l-impact-du-numerique-sur-le-travail http://www.clesdusocial.com/salariat-et-nouveaux-modes-de-travail