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L’accord Renault 2017 : un compromis positif pour l’emploi

samedi 25 mars 2017

Peu d’accords de « compétitivité » ont été signés en France, après la possibilité qui en a été ouverte par l’accord des partenaires sociaux (ANI du 11 janvier 2013), reprise dans la loi sur la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013. Les constructeurs automobiles eux s’en sont servis, comme PSA et Renault dès 2013, alors qu’ils étaient dans une situation économique difficile, tout particulièrement pour leurs usines françaises. Trois ans plus tard et en bien meilleure situation, on vient de le vérifier avec le rachat d’Opel par PSA, les deux groupes ont négocié à nouveau et signé chacune un nouvel accord, PSA en juillet 2016, Renault le 13 janvier 2017. Cet accord Renault est largement majoritaire, signé par la CGC (32 % aux dernières élections), la CFDT (20,4 %) et FO (12,8 %).

Que contient l’accord Renault Cap 2020 ?

Sous-titré « contrat d’activité pour une performance durable de Renault en France », il s’agit, contrairement à celui de 2013, d’un accord offensif, avec des mesures pour l’entreprise comme pour les salariés, pour les années 2017-2019.

Pour les salariés : des garanties en emplois et améliorations sociales

L’accord comporte l’engagement de l’entreprise de garder ses 11 sites et 8 filiales en France, de leur apporter un volume de production au moins égal à celui de 2016 (bien remonté depuis l’accord de 2013) et au moins un nouvel modèle ou plateforme par usine. Pour cela l’entreprise augmentera sa recherche et développement, dont l’ingénierie du prochain véhicule électrique et une nouvelle boîte de vitesse automatique. Elle investira spécifiquement 500 millions d’euros d’amélioration des installations dans ses usines, dont 150 millions pour la qualité de la vie au travail.

Alors que l’accord de 2013 comportait un plan de départs volontaires, l’entreprise s’engage cette fois-ci à recruter au moins 3 600 salariés en CDI, dont la sécurisation d’une partie des 8 000 intérimaires, 2 % pour les salariés de 50 ans et plus et 30 % pour les moins de 30 ans ; et parmi ces derniers, les jeunes entrés dans l’entreprise par sa politique jeunes. Ainsi que 6 000 jeunes, stagiaires et salariés en alternance pour un taux de 5 % de l’ensemble des salariés. Et la conservation d’un effectif de salariés de 55 ans et plus à 15 % des effectifs, tout en leur maintenant la possibilité d’un départ anticipé par « dispense d’activités pour carrières spécifiques » (15 ans en équipes, ou 10 % d’incapacité permanente).

Dans le cadre d’une politique de GPEC, l’investissement en formation professionnelle se montera à 220 millions en 3 ans, tout particulièrement pour développer l’accès à l’outil numérique et en développant une organisation apprenante. Mais tout en reconnaissant un droit à la déconnexion hors temps de travail et même pendant.

La qualité de vie au travail : outre l’investissement annoncé, cette partie de l’accord comprend des mesures managériales, tels le dialogue sur la qualité du travail, l’accentuation de la sécurité vers 0 accident, des équipes ramenées à 25 personnes maximum, l’amélioration de l’ergonomie des postes, de nouveaux environnements de travail… L’entreprise en attend aussi une hausse de la productivité, par une meilleure QVT.

Pour l’entreprise : du mieux en compétitivité et efficacité

En contrepartie, l’accord organise plus de flexibilité dans l’organisation du travail pour permettre à l’entreprise de s’adapter plus vite aux évolutions de la demande. Les salariés gardent leurs 35 heures, mais en cas de charges plus importantes, ils pourront être amenés à faire une heure de plus par jour, payée en heure supplémentaire, avec un maximum de 8 fois en 1 mois et 50 fois dans l’année. Le maximum d’heures supplémentaires est porté à 210 heures par an. L’entreprise pourra faire appel à des équipes le samedi sur volontariat. Elle aura aussi la possibilité, en cas de basses charges, d’imposer des jours de congé tout en payant le salaire à 100 % et, quand la charge remontera, les salariés « rendront » ces journées à l’entreprise. Au total, le calcul du temps de travail sera triennal.

Les raisons du succès dans une négociation de tels accords

Elles sont multiples, notamment :

  • La négociation suppose une évaluation pragmatique de la situation pour trouver le meilleur compromis possible. Bien sûr, il est plus facile de négocier quant la santé de l’entreprise est suffisamment bonne. Mais quand la situation de l’entreprise est difficile (accords défensifs, comme les 2 accords Renault et PSA de 2013), cette évaluation est d’autant plus nécessaire. Le pragmatisme s’évalue aussi dans la comparaison des usines françaises avec les usines européennes les plus proches et dans le cas présent avec l’Espagne. Les accords français ont suivi les accords de compétitivité espagnols signés par les CC OO et l’UGT qui ont permis là aussi de surmonter la crise.
  • Sa capacité de réussite est bien sûr liée au contenu de l’accord proposé aux salariés : chez Renault, les propositions ont été améliorées à la 9ème et dernière séance, présentant ainsi un accord jugé plus équilibré par les syndicats.
  • La négociation dépend aussi de la qualité des relations sociales antérieures des parties prenantes de la négociation et du développement d’une culture du compromis. Un des points de l’accord Renault est d’ailleurs un engagement sur un dialogue social décentralisé avec les directions d’établissement.

Source-

  • Texte de l’accord :
    L’accord Renault 2017