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Election d’Yves Veyrier à la tête de FO

mercredi 12 décembre 2018

Probablement un moindre mal pour la troisième confédération syndicale, l’élection d’Yves Veyrier met un point final à la crise qu’a traversé Force Ouvrière après l’élection au printemps dernier de Pascal Pavageau, les scandales du fichier et des rémunérations des dirigeants de FO et enfin sa démission. Yves Veyrier, membre de la direction sortante, était probablement le seul des trois candidats à pouvoir tenter de ressouder l’organisation. Mais avec 45,75 % des voix et une organisation traumatisée et divisée la tâche sera rude.

Une élection inédite

Elire un nouveau secrétaire général après à peine six mois de mandat du précédent est de l’inédit pour Force ouvrière où les prédécesseurs avaient occupé ce poste au minimum 14 ans (26 ans pour André Bergeron). Autre nouveauté et même si Force ouvrière avait connu une compétition pour le poste de secrétaire général lors de l’élection de Marc Blondel, c’est la première fois qu’il y avait trois candidats. Résultat : le nouveau patron du syndicat Yves Veyrier n’a été élu que d’une courte tête avec 45,75 % des voix contre 43,35 % à Christian Groslier (Fonction publique) et 10,9 % à Patrice Clos (Fédération Transports). C’est indiscutablement une source de fragilité pour le nouveau secrétaire général.

Une organisation qui sort divisée de cette crise mais qui pourrait s’en remettre rapidement

Le dernier congrès avait montré déjà les fortes divisions internes de FO notamment à la suite de l’épisode des ordonnances où Jean-Claude Mailly avait été largement critiqué en interne sur son attitude modérée vis-à-vis du gouvernement. Les débats houleux voire violents entre militants révolutionnaires (d’obédience trotskiste pour la plupart) et les réformistes issus pour beaucoup de la métallurgie avaient marqué ce congrès. Et même si Pascal Pavageau avait été élu sans problème, le traumatisme était réel et les rancœurs tenaces. Le côté très clivant du nouveau secrétaire général, ses projets d’audit externe et les révélations sur le fichier interne d’abord et ensuite les rémunérations et les frais de déplacements des dirigeants ont fait le reste.

Incontestablement, la situation de FO est difficile en interne et la tâche d’Yves Veyrier va être compliquée. Il va devoir apaiser les tensions, remettre de l’ordre et rassembler son organisation. Même un peu à la baisse, les résultats obtenus par son organisation aux élections fonctions publiques devraient apporter un peu d’apaisement.

En fait, personne dans FO n’a intérêt à des tensions telles qu’elles amèneraient l’éclatement de l’organisation. Ni les trotskistes qui y trouvent un lieu d’accueil et des moyens dont ils ne disposeraient pas ailleurs, ni les réformistes qui n’auraient d’autre solution que de se rapprocher d’une autre organisation, ce qu’aucun d’entre eux n’envisage. Enfin, cela se traduirait par un affaiblissement de l’organisation tel qu’elle risquerait de perdre sa représentativité dans de nombreuses branches du privé et peut-être même au niveau interprofessionnel national.

Par sa personnalité, son passé syndical à l’intérieur de FO, le choix de Yves Veyrier est plutôt une bonne nouvelle pour son organisation.

Qui est Yves Veyrier ?

Agé de 60 ans, le nouveau secrétaire général de FO a pratiquement passé 35 ans de sa vie professionnelle au service du syndicat. Ingénieur en météorologie, il devient rapidement secrétaire général de la fédération de l’équipement, de l’environnement, des transports et des services. Il a longuement côtoyé Marc Blondel avant de rentrer au Bureau confédéral en 2004 lors de l’élection de Jean-Claude Mailly dont il était proche. À ce titre, il a eu de nombreuses responsabilités en interne et à l’international. Il est aussi membre du Conseil Économique Social et Environnemental. Il connaît donc FO comme sa poche et dans ce climat de division c’est certainement un atout non négligeable.

Discret, voire pour certains d’abord plutôt froid, mais sans manquer d’humour, Yves Veyrier ne se veut l’héritier d’aucun de ses prédécesseurs même si ses deux concurrents lui reprochaient d’être « un clone de Jean-Claude Mailly ». Il est incontestablement le pur produit de FO sur ses valeurs de laïcité, d’indépendance syndicale et de patriotisme d’organisation au point quelques fois d’en paraitre dogmatique. Son activité à l’international lui a permis de nouer des liens avec les représentants des autres organisations emprunts de respect et de confiance.

Même s’il laisse le doute sur la durée de son mandat, celui-ci sera de toutes façons court et il va devoir dès maintenant s’attacher à se trouver un successeur qui requiert le soutien d’une majorité de l’organisation.

Souvent les dirigeants de transition surprennent par leur capacité à faire évoluer leur organisation. Aura-t-il cette ambition pour redonner du sens à l’action de Force ouvrière et de la fierté à ses militants ? Dans cette période troublée où certains s’interrogent sur l’utilité des syndicats et d’autres sur l’utilité de FO, la tâche s’avère particulièrement difficile.


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