1. Accueil
  2. > Protection sociale
  3. > Retraite
  4. > Avril 1910, première loi sur la retraite

Avril 1910, première loi sur la retraite

lundi 5 avril 2010

La loi créant les retraites a 100 ans.

La loi du 5 avril 1910 institue une « retraite de vieillesse » pour les salariés du commerce, de l’industrie et de l’agriculture. Cette retraite devait être constituée par des versements obligatoires et facultatifs des assurés, par des contributions des employeurs et par une allocation viagère de l’Etat. Les fonctionnaires, eux, avaient une retraite depuis 1853.

La loi Elle place hors du régime de retraite les salariés ayant une rémunération annuelle supérieure à 3 000 fr (11 000 €). Elle permet d’exempter les salariés qui préfèreraient se constituer une épargne en achetant un bien immobilier. Elle maintient aussi les régimes spéciaux existants pour les employés des chemins de fer, des tramways, des mines et les marins.

L’âge de la retraite est fixé à 65 ans, mais une liquidation anticipée est possible à partir de 55 ans, la retraite réduite en conséquence. La liquidation sera aussi effectuée pour les personnes blessées ou devenues infirmes avant 65 ans, avec une retraite de 360 fr (1 315 €) maximum par an.

Les versements obligatoires annuels des salariés sont de 9 fr (33 €) pour les hommes, 6 fr (22 €) pour les femmes, 4,50 (16,50 €) pour les jeunes de moins de 18 ans, soit 2 % du salaire. L’allocation complémentaire de l’État est fixée à 60 fr (environ 220 €) à 65 ans. Les employeurs apportaient aussi 2 % du salaire.

On ne fixe bien sûr pas le montant des retraites, mais des règlements d’administration publique devaient être établis pour fixer les « tarifs des retraites » pour chaque caisse. Les seuls montants cités par la loi, 180 fr (657 €) ou 360 fr (1 315 €) par an donnent une idée de la différence de pouvoir d’achat entre ce siècle et le nôtre : ce sont de très petites retraites, qui correspondent à 40 % du salaire (le salaire moyen ouvrier était de 1 300 fr en 1910, soit 4 745 €).

Les versements salariés et patronaux étaient effectués auprès de différentes caisses de retraites, caisse nationale (créée en 1850 et gérée par la caisse des dépôts et des consignations), sociétés de secours mutuels, caisses départementales ou régionales, caisses patronales ou syndicales… Les sommes récoltées étaient gérées par capitalisation.

La dernière partie de la loi ouvre ces caisses aux fermiers, métayers, cultivateurs, artisans et petits patrons (maximum un salarié) la possibilité facultative de se constituer une retraite en adhérant à une de ces caisses, avec, pour les métayers, un abondement obligatoire de leur propriétaire égal à leur cotisation annuelle.

La mise en œuvre de la loi devait faire l’objet d’un rapport annuel au président de la république et le suivi était effectué par un conseil supérieur des retraites ouvrières, composé de personnes qualifiées sur le sujet et de hauts fonctionnaires.

Mais en fait, il avait fallu 30 ans entre la première proposition de loi sur le sujet et l’adoption en 1910, en raison d’oppositions multiples : celle des députés opposés aux gouvernements progressistes du début du XXè siècle ; celle des employeurs pour qui cela créait une nouvelle charge ; et celle de la CGT qui, bien que favorable au principe des retraites, trouve que 65 ans est trop élevé vue l’espérance de vie et surtout s’oppose au financement des retraites par des versements salariaux et patronaux et en renvoie la responsabilité au gouvernement en demandant un « budget des retraites ».

La mise en œuvre fut donc limitée, en raison des difficultés des très petits salaires à verser une cotisation, par la décision de la Cour de cassation en 1911 qui en casse le caractère obligatoire, par les oppositions qui ralentirent le mouvement d’inscriptions des salariés aux caisses et surtout ensuite par le déclenchement de la guerre de 1914. Il faut attendre 1928 puis 1930 pour qu’une nouvelle loi ré-institue des retraites obligatoires, par capitalisation, d’où leur effondrement avec l’inflation et la Seconde guerre mondiale.

Par comparaison :

  1. C’est l’Allemagne de Bismarck qui crée en 1883 le premier système obligatoire de retraites, financé par la capitalisation de cotisations ouvrières et patronales, pour une retraite à 70 ans.
  2. La Nouvelle-Zélande est elle aussi pionnière, les pensions de retraites sont créées en 1898.
  3. Au Royaume-Uni, la première loi date de 1909 : l’État accorde une pension – faible - aux personnes de 70 ans et plus ayant de faibles ressources.